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Les conventions de management fees : nouveau terrain de chasse de l'Administration

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Catégorie : Contrôle fiscal
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ProfilTom12
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Le point sur les conventions de management fees

Les conventions de management fees ou conventions d'assistance technique et administrative entre sociétés d'un groupe sont relativement courantes. En règle générale, c'est la société holding qui facture un certain nombre de prestations de services à ses filiales.

Les conventions de management fees sont des services extérieurs que l'on peut comptabiliser dans un compte 628xxx.

L'administration fiscale surveille de près ces conventions.

L'administration a toujours considéré que les groupes forment des « cibles » de choix. La surface financière d'un groupe est souvent nettement plus capable de supporter des redressements, au point où Bercy a même indiqué, dans son rapport sur le contrôle fiscal en France de 2008, que 96% des sommes redressées de façon définitive dans des sociétés d'un groupe, sont recouvertes. La multiplication des échanges internes entre sociétés membres se prête facilement à la critique, du fait de l'intérêt économique global qui transcende le groupe.

 

Qu'appelle-t-on conventions de management fees ?

En réalité, les petits et moyens groupes sont imprégnés d'une cohérence économique qui pousse les entités membres à créer des marchés entre elles. On parle de groupes fortement intégrés, les besoins des uns étant satisfaits, au moins partiellement, par d'autres membres.

Pour la plupart des entreprises, la fonction administrative constitue un centre de coût, qui est très difficile à rentabiliser. Or dans un groupe, il n'est pas rare d'observer que les moyens administratifs de back-office soient centralisés au sein d'une structure (souvent la mère), et mis à disposition contre rémunération aux filiales du groupe. On parle alors de prestations d'assistance administrative, ou de management fees.

Les contrats d'assistance administrative entre les sociétés d'un même groupe recouvrent divers domaines de compétence administrative. Il peut s'agir notamment de prestations comptables, juridiques (gestion des contentieux, secrétariat juridique), fiscales (établissement des déclarations, gestion des relations avec les intervenants extérieurs), services informatiques, prestations commerciales, etc...

La mise en place de ce type de convention se justifie notamment sur un plan patrimonial. En effet, rappelons qu'en principe l'activité d'une société holding relève de la gestion de patrimoine privé, ce qui constitue une activité non professionnelle. Or cette qualification peut avoir des conséquences fiscales lourdes, notamment en matière d'ISF, ou dans le cadre d'un pacte Dutreil.

Pour bénéficier de régimes fiscaux de faveur, constituent des sociétés holdings actives, des sociétés qui, outre la gestion de leur portefeuille de titres :

  • participent activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle des filiales ;
  • et rendent à titre purement interne au groupe, des services spécifiques administratifs, juridiques, comptables financiers ou immobiliers.

Dès lors, la mise en place de conventions de management permet « d'activer » la société holding, lui confiant alors un caractère professionnel. On parle alors de sociétés holdings animatrices (ou mixtes), qualification s'opposant à la notion d'Holding pure.

Les évolutions jurisprudentielles récentes ont mis à jour un ensemble de pièges associés à ces conventions, dont il nous a semblé utile de faire écho.

 

Quelques généralités sur les conventions d'assistance administrative ou management fees



Question

Eléments de réponse

Quel est l'intérêt de telles conventions de management fees ?

En premier lieu, il existe indéniablement un intérêt organisationnel (mutualisation de certaines prestations, mise en commun de moyens, accroissement de l'efficacité managériale, etc). On pourrait également citer des intérêts financiers (gestion des demandes de financement, négociation avec les partenaires bancaires), ou encore juridiques. Il est à noter que ces conventions sont particulièrement utilisées dans les opérations de type LBO, pour faciliter la gestion de la dette senior d'acquisition, lorsque celles-ci sont couplées avec l'intégration fiscale.

Il convient également de noter que de telles conventions peuvent permettre de réduire le coût de la taxe sur les salaires (TSS). Rappelons que cette taxe, instaurée par l'article 231 du CGI, est due par tout employeur en France ayant une activité dont au moins 10% des revenus générés ne sont pas assujettis à la TVA. Or les activités financières (dividendes, intérêts sur C/C), qui constituent souvent l'une des sources principales de revenu pour des sociétés holdings, sont des activités exonérées de TVA. Les mandataires sociaux du groupe sont régulièrement centralisés au sein de la société holding. Souvent figurant parmi les salaires les plus élevés du groupe, le coût de la TSS sur ces salaires peut s'avérer important. Le CE, dans ses décisions du 8/06/2011 [1], a confirmé le fait que les mandataires sociaux ont des fonctions transversales dans une société, et ne peuvent être rattachés à un secteur spécifique d'activité. C'est donc le prorata général TSS qui déterminera l'assiette de la taxe pour ces personnes. La facturation de prestations taxables permet de réduire le prorata général d'assujettissement de la TSS sur les salaires versés à ces personnes.

Signalons enfin que de telles conventions permettent « d'activer » les sociétés holdings d'un groupe. Or l'article 885-1-ter du CGI prévoit une exonération d'ISF pour les titres de PME (au sens communautaire). Dans son instruction administrative de 2010 [2], l'Administration a indiqué « il est rappelé que les souscriptions au capital de sociétés holdings animatrices de leur groupe, qui participent activement à la conduite de sa politique et au contrôle de leurs filiales et leur rendent, le cas échéant et à titre purement interne au groupe, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers, sont considérées, pour le bénéfice de l'exonération d'ISF prévue à l'article 885 I ter du CGI au titre de l'investissement direct, comme des souscriptions directes au capital de sociétés opérationnelles (Inst. n° 38) ». L'activation des sociétés holdings permet donc d'optimiser la gestion de l'ISF des actionnaires personnes physiques à la tête du groupe.

Quels services peuvent faire l'objet d'une telle convention ?

Il n'existe pas de liste exhaustive.
Toutefois, l'article 7.14 des principes OCDE applicables en matière de prix de transfert cite notamment « les services administratifs comme la planification, la coordination, le contrôle budgétaire, les conseils financiers, la comptabilité, la vérification des comptes, les services juridiques, l'affacturage, les services informatiques, les services financiers, la gestion du risque de taux d'intérêt et de change, le refinancement, l'assistance pour la production, les achats, la distribution et la commercialisation, et enfin, les services de gestion du personnel notamment en ce qui concerne le recrutement et la formation ».

Quelles sont les conditions d'opposabilité à l'Administration fiscale ?

L'Administration est assez attentive quant à la mise en œuvre de ces conventions. Il faut s'assurer en premier lieu de la réalité des services rendus. A ce titre, l'OCDE préconise de « rechercher si dans des circonstances comparables, il s'agit d'une activité pour laquelle une entreprise aurait été disposée à payer ». Dans un second temps, il faut veiller à ce que le prix soit en adéquation avec les prestations fournies.
La déduction de telles redevances d'assistance est subordonnée à la production, par le contribuable, de justifications extra-comptables démontrant la réalité et l'étendue des services rendus, ainsi que du caractère non excessif du prix facturé.

[1] CE 8 juin 2011, 331848, Sté Sofic, 331849, SAS Holding Rousseau HCP, 341018, Sté P2C Investissement, 340863, SA Balsa : RJF, 8-9/2011, n° 936; BDCF 8-9/2011, n° 99

[2] BOI-PAT-ISF-30-40-70-10

 

Question

Eléments de réponse

Comment s'opère la refacturation de ces services ?

En pratique, à l'exception des prestations d'une certaine importance spécifiquement rendues à une filiale (et donc directement facturables à cette dernière), la société prestataire recense pour chaque fonction support (marketing, finance, informatique...) l'ensemble des coûts directs (salaires chargés) et indirects (frais de déplacement, honoraires, coût de location..) et affecte à chacune de ces lignes de coûts un pourcentage censé représenter la quote-part des dépenses imputables à la société prestataire elle-même.

Le solde donne par fonction un montant qu'il convient alors de facturer aux différentes sociétés opérationnelles du groupe, qui utilisent ces services. L'Administration fiscale admet que cette répartition soit réalisée avec une clé de répartition. Si le plus souvent, la clé retenue est le chiffre d'affaires, cette dernière n'est pas toujours adaptée, notamment lorsque les filiales ont des activités très différentes. Il convient autant que possible de recourir à la notion de temps passé (service marketing, conseil, etc.), ce qui suppose un suivi des temps au niveau de la société prestataire, ou à toute autre clé cohérente (par exemple, le nombre de postes informatiques pour un contrat informatique).

La société prestataire doit-elle marger ?

S'agissant du prix, les règles applicables aux contrats industriels sont applicables.
Une marge de 0% à 15% semble admise, sauf lorsque les conditions du marché permettent un taux de marge plus élevé (taux horaire des cabinets comptables par exemple).

 

L'évolution préoccupante de la jurisprudence sur les conventions de management fees

L'arrêt Mécasonic (Cour de Cassation Chambre Commerciale du 23/10/2012 N° 11-23376) est venu rappeler aux praticiens qu'avant tout, une convention de management est une convention.

Le mot convention, du latin conventio, signifie « venir ensemble », ou être d'accord.

Conclure une convention, c'est matérialiser un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes, destiné à produire des effets de droit. Les conventions intragroupes peuvent être regardées comme l'expression d'une volonté collective des sociétés membres du groupe de tendre vers un objectif commun. Ces conventions matérialisent l'appartenance des parties à une même entité, justifient l'existence des relations privilégiées entre elles, et contribuent à donner une légitimité à des transactions pouvant être critiquables pour une société prise isolément.

Mais groupe ou pas, le Code Civil fixe quatre conditions de fond, dont la réunion simultanée est nécessaire pour caractériser l'existence juridique d'un contrat. Il s'agit du consentement, de la capacité, de l'existence d'un objet et surtout de l'existence d'une cause.

La cause de la convention, c'est sa raison d'être. En droit moderne, on parle de la cause subjective, théorie développée en 1920 par Henri CAPITANT, qui définit la cause comme étant « la volonté des parties qui engendre leurs obligations ». Autrement dit, il s'agit de la contrepartie de l'obligation contractuelle. Et l'article 1 131 du Code Civil nous rappelle que « L'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet ».

Et c'est justement l'absence de cause qu'est venue sanctionner la Haute Cour, d'abord dans la jurisprudence Samo Gestion, avant de confirmer cette position dans l'arrêt Mécasonic. Rappelons que ces principes avaient déjà été rappelés par la CAA de Nancy au travers de l'arrêt Glamor de 2003.

 

L'arrêt SAMO GESTION

Cass. Com. 14 septembre 2010 n°09-16.084, Sté Samo gestion c/ Sté Sorepla

Cet arrêt, datant de 2010, a été rendu, il faut le dire, dans le cadre d'un litige portant sur un contrat, pour le moins, léger. La société Samo Gestion, constituée par les soins du Directeur Général de la société Sorepla Industrie, a conclu avec cette dernière société une convention, aux termes de laquelle Samo Gestion s'engageait à fournir à Sorepla Industrie des prestations de service et mettait à la disposition de Sorepla Industrie les services de son fondateur (à savoir le propre Directeur Général de Sorepla Industrie ), en contrepartie d'une rémunération fixe, assortie d'un intéressement sur le résultat net de la société Sorepla Industrie
Suite à un changement de directeur général, Sorepla Industrie a demandé l'annulation de cette convention et la restitution des sommes versées en exécution de la convention d'assistance à Samo Gestion.

La Cour d'appel de Paris, par un arrêt du 13 mars 2009, a annulé, sur le fondement de « l'absence de cause », cette convention de prestations de service, au motif que, même si elle avait été préalablement approuvée en qualité de convention réglementée par le Conseil d'administration de la société Sorepla Industrie, cette convention de prestations de service qui mettait à la disposition de la société Sorepla Industrie son propre Directeur général « faisait double emploi avec l'exercice de ses fonctions de directeur général, la convention définissant son objet dans les termes les plus étendus, « l'action commerciale, gestion industrielle, gestion des ressources humaines, gestion administrative et financière, stratégie générale, prestation de direction ", que cette convention revenait à rémunérer des prestations d'ores et déjà accomplies » par ce Directeur Général ès qualité.

La chambre commerciale de la Cour de Cassation a confirmé entièrement cette analyse, rappelant notamment que « la rémunération du directeur général est déterminée par le conseil d'administration et ne peut être fixée par une convention conclue avec un tiers, peu important à cet égard que cette convention ait été autorisée par le conseil d'administration »

Compte tenu de la rédaction particulièrement maladroite de cette convention, ayant pour effet la mise à disposition de la société de son propre D.G., il est évident que la Haute Cour ne pouvait statuer autrement. Rappelons que la qualité de dirigeant et à fortiori celle de D.G. est très encadrée par la loi, qui confère à une telle personne, un ensemble de droits (les plus entendus) et d'obligations (d'investir le temps nécessaire pour permettre à la société de vivre pleinement sa vie sociale).

C'est également la loi qui encadre les modalités de détermination de la rémunération des dirigeants d'une société. Or aucune convention de droit privée ne peut écarter la loi.

 

L'arrêt MECASONIC

Cour de Cassation, Chambre Commerciale 23/10/2012 « Mécasonic » n° 11-23376

En l'espèce, le président directeur général de la société A a engagé ladite société dans un contrat de prestations de services conclu avec une société unipersonnelle B dont il était gérant associé unique. Les prestations promises consistaient en la création et le développement de filiales à l'étranger, l'organisation et/ou la participation à des salons professionnels, la définition de stratégie de vente dans les différents pays visés et la recherche de nouveaux clients à l'étranger. Lorsqu'il fut démis de ses fonctions, il demanda le paiement de l'indemnité conventionnelle prévue à la convention.

La cour d'appel n'a pas fait droit à sa demande, au motif qu'une telle convention constituait « une délégation à la société unipersonnelle B dont Monsieur X est le gérant d'une partie des fonctions de décision, de stratégie et de représentation incombant normalement à ce dernier en sa qualité de directeur général de la société A ». Elle en déduit que la convention litigieuse était dépourvue de cause et devait en conséquence être annulée. La Cour de cassation acquiesce et rejette le pourvoi formé par l'intéressé et sa société.

 

L'arrêt GAMLOR de 2003, rendu par la CAA de Nancy

CAA Nancy 9 octobre 2003 N° 98-2182, SA GAMLOR, RJF 1/04 N° 10

Cet arrêt avait été rendu dans le cadre d'un litige opposant un contribuable à l'Administration. Au cours d'une vérification de comptabilité, l'Administration avait attaqué une convention de management dans la société vérifiée. La Cour d'Appel l'a suivie en raisonnant comme suit :

  • une filiale ne peut pas déduire les sommes qu'elle verse à sa société mère, pour la mise à disposition de son propre PDG (salarié de la mère) en l'absence de preuve de prestations distinctes des tâches inhérentes à des fonctions normales de président ;
  • en décidant de ne pas rémunérer son président, la société filiale prend une décision de gestion qui lui est opposable. Aucune convention ne peut outrepasser les prérogatives légales de l'organe compétent pour fixer la rémunération dudit mandataire ;
  • si la TVA peut être déduite même lorsque l'opération en cause relève de l'acte anormal de gestion, encore faut-il que les sommes versées correspondent à une prestation de services effectivement réalisée ;
  • en l'absence de prestations différentes de celles normalement inhérentes aux fonctions de son président par ailleurs non rémunéré par elle, une société ne peut ni déduire les sommes versées au titre de rémunération forfaitaire des prestations de présidence à sa société mère de son assiette IS, ni déduire la TVA sur ces sommes ;
  • commenter gérer les risques associés à ces conventions ;
  • les prestations trop générales ou trop étendues sont à proscrire.

Dans les arrêts précités, les tribunaux sanctionnent l'absence de contrepartie aux rémunérations versées par la société bénéficiaire, à la société prestataire. Dès lors, il convient d'être très attentif à la rédaction de la clause qui définit la contrepartie du contrat, ou en pratique, la liste des prestations à fournir par le prestataire.

Il convient notamment d'éviter de rémunérer des services déjà couverts par le mandat social. Des phrases du style « l'action commerciale, gestion industrielle, gestion des ressources humaines, gestion administrative et financière, stratégie générale, prestation de direction » sont à éviter. Il convient de préférer des prestations précises, qui ne font pas doublon avec la qualité de mandataire social.

Dans le cas où le dirigeant est commun aux deux sociétés cocontractantes, on va éviter d'utiliser des termes tels que « prestations de direction » ou « fonctions de direction générale ». Il ne faut pas, non plus, faire référence à des activités de « développement à l'international » ou encore « définition de la stratégie de développement commerciale ». En revanche, la facturation de prestations techniques, requérant une expertise particulière, semble admise.
Il ne faut pas hésiter à rentrer dans le détail de la prestation, et de mettre en place des systèmes prévoyant des rendus mensuels, ou trimestriels permettant de matérialiser l'exécution de la prestation facturée.

 

Respecter la réglementation des conventions réglementées

On rappelle que le Code de Commerce organise un système de contrôle des conventions dites réglementées. Rappelons qu'on distingue trois types de conventions susceptibles d'exister dans une société.

Il y a les conventions interdites, les conventions libres, et une troisième catégorie est en quelque sorte une catégorie intermédiaire, entre celles qui ne font courir aucun danger au patrimoine de la société (conventions libres) et celles qui sont évidemment nocives pour ce même patrimoine.

On parle alors de conventions réglementées. La loi ne donne aucune définition des conventions réglementées, se bornant plutôt à identifier les personnes susceptibles d'en être concernées, et organisant une procédure d'autorisation et de contrôle qui s'appuie sur l'assemblée des associés, et sur le commissaire aux comptes. En revanche, la jurisprudence est intervenue pour circonscrire leur champ d'application, se fondant sur la volonté exprimée par le législateur de protéger les intérêts de la société.

L'ANSA [6] a même précisé que « le législateur a manifestement voulu que les conventions conclues intuitu personae, ou comportant des clauses spécifiques liées aux relations particulières des parties contractantes soient signalées par les intéressées et listées, alors même qu'elles seraient afférentes à des opérations courantes et conclues à des conditions normales ».

Les conventions de management sont, à mon avis, des conventions réglementées, et doivent se soumettre aux différentes étapes de contrôle imposées par la loi. Mieux vaut être trop prudent que pas assez. D'autant plus que les conventions qui seraient frappées d'une nullité motivée par l'abus de majorité constituent, de jurisprudence constante, des actes anormaux de gestion sur un plan fiscal.

[6] Association Nationale des Sociétés par Actions, dans son bulletin février 2002, N° 3118

 

Choisir des modalités de rémunération cohérentes pour les prestations de management fees

En pratique, dans la mesure où on attaque la réalité de la contrepartie, il incombe au prestataire de constituer, dès la conclusion de la convention de prestation, des preuves permettant de justifier :

  • l'existence d'une prestation réellement exécutée ;
  • la cohérence entre les modalités de la rémunération, et le bénéfice retiré de la prestation par le bénéficiaire desdites prestations.

A mon sens, il convient notamment d'intégrer, chaque fois que possible, la notion de temps passé. Facturer le temps passé suppose un suivi des temps, certes, mais constitue, sur un plan fiscal, une modalité de valorisation des services quasiment inattaquable par l'Administration fiscale. Encore faut-il toutefois que le taux horaire de facturation soit cohérent avec une prestation externe au groupe. Ainsi par exemple, il semble peu possible de facturer une heure de saisie comptable à un tarif nettement au dessus de celui proposé par des cabinets d'expertise comptable.

 

Optimiser la rémunération du mandat social

Rappelons que la facturation de management fees n'est pas le seul moyen à disposition des sociétés pour remonter de l'argent sur la société mère.

Lorsque la forme sociale le permet (c'est notamment le cas des S.A.S.), il est toujours possible de nommer une personne morale en qualité de mandataire social d'une société.

Dès lors, il est possible de voter la rémunération du mandat au profit de la société mandataire, et d'éliminer ainsi tout risque susceptible d'exister dans le cadre de relations contractuelles.

En pareil cas, il faut toutefois être attentif que le niveau de rémunération soit cohérent avec celle susceptible d'être pratiquée entre des parties non-liées.

 

Conclusion : management fees et TVA

Dans un groupe, il n'est pas inhabituel de rencontrer un certain laxisme en matière de relations intragroupes. Combien de fois j'ai entendu la phrase « on a toujours fait comme ça » au cours de mes travaux comptables. Et c'est justement là le piège.

Si les arrêts sus-cités ont principalement été rendus en matière commercial, aujourd'hui, rien ne s'oppose à ce que l'administration puisse être tentée de s'appuyer sur l'absence de cause pour justifier ses rectifications.

Certes, dans les groupes intégrés, la neutralisation des subventions, qui est de droit, offre une certaine protection contre une telle approche de la part de l'Administration...
Mais uniquement sur le plan de l'IS.

Quid de la TVA ?

Tout d'abord, la TVA n'est pas du tout concernée par le régime d'intégration fiscale. La notion d'acte anormal de gestion ne s'applique pas à cette taxe [7], d'autant plus que la réforme de la TVA de 2008 a supprimé la notion de « dépense nécessaire à l'exploitation » en tant que critère liminaire au droit de déduction. Lorsque les conditions de déduction sont remplies, et que l'opération n'est ni fictive, ni frauduleuse, l'Administration ne peut s'opposer à la déduction de la TVA facturée.

Un rescrit fiscal du 23/10/2007 a indiqué qu'à « compter du 1er janvier 2008, les assujettis sont donc fondés à déduire la TVA qui grève leurs dépenses pour autant que, sur le fond, celles-ci ne soient pas visées par une mesure d'exclusion particulière et qu'elles soient utilisées pour les besoins de leurs opérations ouvrant droit à déduction (CGI art. 271, II-1). Il importera donc que la dépense en cause soit affectée par l'assujetti à son activité économique, c'est-à-dire qu'elle réponde aux besoins de son exploitation » [8].

S'agissant de la TVA collectée, elle ne peut être assise que sur des sommes réellement encaissées, et jamais sur des sommes qui auraient dû être facturées. Ainsi, les rappels effectués en application de la théorie d'un AAG ne peuvent pas donner lieu à un rappel de TVA [9].

La TVA déductible est celle facturée y compris lorsque le prix facturé est anormalement élevé. Toutefois, l'Administration attache une grande importance à la réalité d'exécution de la prestation facturée. Dans le cadre des prestations intragroupes, la réalité de la prestation doit être démontrée (attention donc aux conventions sans cause), tout comme il doit être démontré que le prix à payer a été réellement acquitté par le débiteur. A défaut, la TVA facturée n'est pas déductible et revêt un caractère fictif [10].

[7] Conformément à la décision du Conseil d'Etat – CE 6 Juillet 1988 N° 46 549

[8] Décision de rescrit 23/10/2007 – N° 2007/41/TCA

[9] Voir CE 19/02/1975 N° 93262 – Cas de prestations intragroupes pour un prix anormalement bas, et CE 19/06/1986 N° 45523 – Cas de renonciation à des recettes taxables

[10] CE 6/12/1985 N° 33195 et CE 2/04/2003 N° 233375


Le 05/08/2016 13:08, Melissam a écrit :
  

Dans les arrêts exposés, la cour vient refuser la déductibilité des services de managemen dans le cas où le dirigeant est commun aux deux sociétés.

Peut on parler de "cout d'actionnaire" définit par l'OCDE devant être exclu du prix des services intra groupe?

extrait du paragraphe 7.9 des principes de l'OCDE éclaire la question: "Dans un petit nombre de cas, une activité intra-groupe peut être exercée vis-à-vis de membres d'un groupe même lorsque ceux-ci n'en ont pas besoin (et lorsqu'ils ne seraient pas disposés à les payer s'il s'agissait d'entreprises indépendantes). C'est donc uniquement en raison de ses participations au capital d'un ou plusieurs membres du groupe, c'est-à-dire en qualité d'actionnaire, qu'un membre du groupe (en général la société mère ou une société holding régionale) exerce ces activités. Il n'y a pas de raison pour que les sociétés qui en bénéficient aient à payer pour ce type d'activités." . Il y a lieu d'exercer son jugement lorsqu'une activité non seulement correspond aux fonctions d'un actionnaire mais est également à l'origine d'un avantage supplémentaire. Un membre du conseil d'administration d'une société mère peut exercer des fonctions liées à la participation de cette société mère au capital des autres membres du groupe. Cette activité serait normalement considérée comme un coût d'actionnaire. "

Si oui, une liste de ces services pourrait-elle aider les groupes ?



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