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Et si la mise au rebut de stock se transformait en acte citoyen ?

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Catégorie : Actualité fiscale et droit des sociétés
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ProfilTom12
Expert-Comptable salarié en cabinet
  • 12 - Aveyron
 
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Stocks obsolètes : bénéficier de la réduction d'impôt mécénat


L'article L123-12 du Code de Commerce impose aux entreprises de faire un inventaire une fois tous les douze mois, permettant de contrôler l'existence et la valeur des éléments actifs et passifs de leur patrimoine, et notamment, l'inventaire des stocks.

Se pose alors, comme chaque année, la question des stocks obsolètes...

 

Faut-il les compter, les valoriser et les comptabiliser, où les « oublier » ?

Rappelons que le droit comptable, tout comme le droit fiscal sont très clairs à ce sujet.

Il faut valoriser les stocks au bilan, et comptabiliser, le cas échéant, une provision pour dépréciation. Mais dans la pratique, il n'est pas rare de voir des entreprises choisir tout simplement de ne pas les constater dans les comptes. Ce choix est souvent lié à la volonté d'éviter d'avoir des écarts de marge importants les années lors desquelles les entreprises décident de se débarrasser de ces stocks (la reprise de la provision n'étant pas retenue pour le calcul de la marge comptable).

Pourtant, en agissant ainsi, l'entreprise risque de se priver d'un avantage fiscal intéressant.

L'obsolescence des stocks est souvent liée à la politique commerciale de l'entreprise, lorsqu'elle se trouve sur un marché fortement influencé par des tendances de mode.

L'évolution des modes de consommation implique des changements au niveau des gammes proposées à la clientèle - changements de coloris, de style, d'éléments incorporés dans les produits vendus. En conséquence, l'entreprise se retrouve avec des matières de très bonne qualité, qu'elle n'utilise plus, mais qu'elle ne peut revendre.

Certes, elle est obligée de conserver une partie de ce stock pour faire face aux demandes de SAV (service après vente), mais que faire du reste ?

C'est l'article 238 bis du CGI qui permet parfois d'apporter une réponse aux entreprises à ce sujet. Cet article instaure la réduction d'impôt mécénat dont peut bénéficier, sous certaines conditions, toute entreprise en France à raison des dons de ses stocks obsolètes.

Le dispositif de l'article 238 bis permet aux entreprises de bénéficier d'une réduction d'impôt de 60% du montant des dons qu'elle réalise, dans la limite de 0.50% de son chiffre d'affaires hors taxes.

 

Quels organismes peuvent recevoir des dons éligibles ?

C'est la loi qui fixe les organismes pouvant recevoir des dons éligibles à la réduction d'impôt. On y trouve notamment :

  • des œuvres et organismes d'intérêt général à caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ;
  • des fondations d'entreprises ;
  • des fondations ou associations reconnues d'utilité publique ou des musées de France présentant les caractères des œuvres et organismes visés ci-dessus ;
  • des associations cultuelles ou de bienfaisance, ainsi que des établissements publics des cultes reconnus d'Alsace-Moselle et des associations régies par la loi locale maintenue en vigueur dans ces départements, lorsque leur mission est reconnue d'utilité publique ;
  • des établissements d'enseignement supérieur ou d'enseignement artistique publics, ou privés, d'intérêt général, à but non lucratif ;
  • des sociétés ou organismes de recherche agréés ;
  • des organismes agréés ayant pour objet exclusif le financement de PME ou la fourniture à celles-ci de prestations d'accompagnement en début d'activité ;
  • des organismes publics ou privés (y compris des sociétés de capitaux dont les actionnaires sont l'Etat ou un ou plusieurs établissements publics nationaux, seuls ou conjointement avec une ou plusieurs collectivités territoriales) dont la gestion est désintéressée ayant pour objet la présentation au public d'œuvres dramatiques, lyriques, musicales, chorégraphiques et de cirque, ou l'organisation d'expositions d'art contemporain ;
  • de la Fondation du patrimoine, d'une association ou fondation soit abritée par celle-ci, soit reconnue d'utilité publique et agréée par le ministre du budget, en vue de financer la restauration de monuments historiques privés classés à l'Inventaire supplémentaire ou ayant reçu le label de la Fondation du patrimoine ;
  • des fondations universitaires, des fondations partenariales et des projets de thèses proposés au mécénat de doctorat par les écoles doctorales ;
  • des fonds de dotation dont la gestion est désintéressée et qui soit constituent eux-mêmes un organisme d'intérêt général éligible au mécénat, soit reversent à un tel organisme les revenus tirés des versements reçus ;
  • des sociétés dont l'Etat est l'actionnaire unique qui ont pour activité la représentation de la France aux expositions universelles ;
  • des sociétés nationales de programmes (notamment France Télévisions et Radio France) pour le financement de programmes audiovisuels culturels.

 

La forme des dons : espèces ou dons en nature

Le BOFIP [1] rappelle que les versements peuvent être réalisés en espèces mais également sous forme de dons en nature. Constitue un don en nature la remise d'un bien mobilier, ou immobilier, ou encore, la réalisation d'une prestation sans contrepartie. 

Le don d'une partie de son stock peut donc constituer un don en nature, ouvrant droit à la réduction d'impôt.

Rappelons toutefois que seuls peuvent ouvrir droit au régime fiscal du mécénat, les versements qui s'analysent comme de véritables dons, c'est-à-dire, qui n'ont aucune contrepartie directe ou indirecte. Il existe deux atténuations à cette règle :

  • l'article 238 bis, 1-a du CGI permet à l'ensemble des organismes visés à cet article d'associer le nom de l'entreprise versante, aux opérations qu'ils réalisent. Cette disposition permet aux entreprises donatrices de bénéficier de la réduction d'impôt sans que les organismes bénéficiaires n'encourent le risque de la remise en cause de leur caractère non lucratif malgré la fourniture de prestations résultant de la diffusion du nom des entreprises qui les financent. Signalons toutefois que l'administration analyse cette association au cas par cas, afin notamment de s'assurer que l'action de l'entreprise versante n'est pas une action de parrainage.

  • l'administration admet également que la remise par l'entreprise donatrice de biens de faible valeur (notamment des objets publicitaires) aux organismes qui bénéficient des dons, n'est pas de nature à remettre en cause le régime du mécénat.

 

La valorisation des dons en nature

L'article 38 nonies de l'annexe III du CGI rappelle qu'il convient de retenir, pour le calcul de l'assiette de la réduction d'impôt, la valeur stockée des biens meubles donnés aux organismes éligibles dans le cadre du mécénat.

Avant la loi de finances pour 2017, une décision de rescrit fiscal de 2009, reprise au BOFIP, indiquait que « les dons de produits alimentaires peuvent être estimés à la valeur pour laquelle les produits sont ou devraient être inscrits en stock en application des dispositions de l'article 38, 3 du CGI.

Cette valeur s'entendait de la valeur nette comptable, c'est-à-dire après prise en compte des provisions fiscalement déductibles. Ainsi, lorsque cette valeur est nulle, du fait par exemple de la proximité de la date de péremption du produit, aucune réduction d'impôt ne peut être pratiquée. Lorsque les entreprises prennent à leur charge le coût du transport des marchandises qu'elles donnent, elles peuvent bénéficier de la réduction d'impôt à raison de ces dépenses. » [2]

Depuis la loi de finances pour 2017 et la modification des commentaires administratifs en date du 20 juin 2017, les dons de produits alimentaires sont valorisés, comme les autres dons en nature, à leur coût de revient.

 

La TVA et les dons en nature

En application de l'article 257-II-1, 1° du CGI, les entreprises assujetties à la TVA doivent procéder à la livraison à soi-même des biens qu'elles prélèvent dans leurs stocks pour les affecter à des fins autres que leurs besoins.

Cependant, il est admis de ne pas faire application des dispositions de l'article 257-II-1, 1° du CGI et de l'article 221 de l'annexe II en cas de dons effectués à certaines associations sans but lucratif, dont la gestion est désintéressée, qui exportent des biens dans le cadre de leur activité humanitaire ou charitable. Les entreprises donatrices sont alors dispensées de reverser la TVA effectivement déduite lors de l'acquisition des biens prélevés ou de biens et services qui ont été nécessaires à leur fabrication.

Dans ce cas, les associations chargées de l'expédition des produits et matériels doivent remettre à l'entreprise donatrice, une attestation visée par le service des impôts, qui certifient que les biens sont destinés à être exportés et qui comportent l'engagement d'acquitter la TVA exigible au cas où l'exportation ne serait pas réalisée.

Enfin, une décision du 4 janvier 1984 a étendu, sous certaines conditions, le régime prévu pour les dons à destination de l'étranger aux dons consentis en France à des fondations ou associations reconnues d'utilité publique présentant un intérêt général de caractère humanitaire, éducatif, social ou charitable. L'entreprise conserve l'attestation délivrée par l'association pour justifier le non reversement de la TVA initialement déduite.

Liste actualisée au 01/2017 des ARUP (Associations reconnues d'utilité publique), sur le site du ministère de l'intérieur.

 

Le calcul de la réduction d'impôt mécénat 

Rappelons que les dépenses ouvrant droit à la réduction d'impôt sont retenues dans la limite de 0.50% du chiffre d'affaires de l'entreprise donatrice. 

Les dépenses de mécénat et donc ici, le don de stocks non vendus, ne sont pas déductibles du résultat fiscal de l'entreprise donatrice, et doivent donc être réintégrées extra comptablement. En contrepartie, l'entreprise bénéficie d'une réduction d'impôt de 60% du montant des dons effectués.

Lorsque les dons excèdent le plafond de 5 pour mille du chiffre d'affaires, l'excédent est reporté successivement sur les cinq exercices suivants et ouvre droit à la réduction d'impôt dans les mêmes conditions, après prise en compte des versements de l'exercice.

La réduction d'impôt mécénat s'impute :

  • dans les entreprises soumises à l'impôt sur le revenu : sur l'impôt dû au titre de l'année de réalisation des versements quelle que soit la date de clôture de l'exercice ;
  • dans les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés : sur le solde de l'impôt dû au titre de l'exercice au cours duquel les versements sont effectués.

La fraction excédentaire peut être utilisée pour le paiement de l'impôt (acompte ou solde pour les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés) dû au titre de l'un des cinq exercices (ou années) qui suivent.

Dans un groupe de sociétés, la réduction d'impôt d'une filiale intégrée est transmise à la société mère tête de groupe dans les conditions de droit commun. Signalons toutefois que la réduction d'impôt non utilisée par une filiale entrante dans le groupe et provenant d'une période antérieure à l'intégration n'est pas transférable au groupe.

Attention au formalisme à respecter : le don en nature doit être déclaré

L'entreprise doit conserver à l'appui de sa comptabilité, une attestation de mécénat. Cette attestation doit être conforme au modèle proposé par l'Administration.

L'entreprise doit également déposer, avec sa déclaration de résultats, une déclaration 2069-RCI. C'est cette déclaration (disponible sur le site de l'Administration impots.gouv.fr) qui permet à l'entreprise de déclarer la réduction d'impôt mécénat à laquelle elle peut prétendre.

Le calcul de la réduction d'impôt pourra se faire à l'aide de la fiche de calcul n°2069-M-FC proposée par l'administration fiscale.

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