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CSRD : non à une fracture durable de la profession comptable !

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Catégorie : Actualité des métiers du chiffre
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Directive CSRD

La directive européenne CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) s'appliquera à partir du 1er janvier 2024, avec un abaissement des seuils au 1er janvier 2025 (250 salariés, 40 M¤ de chiffre d'affaires ou 20 M¤ de total de bilan), obligeant ainsi les grandes entreprises à faire certifier leurs « rapports de durabilité ».

Longtemps considéré comme un marché à la portée limitée, de nombreux analystes tendent désormais à penser que ce marché devrait toucher en réalité de très nombreuses entreprises placées sous les seuils précités en raison de la nécessité pour les donneurs d'ordre d'intégrer les données de durabilité dans leur chaine de production ou de répondre aux exigences de leurs financeurs.

La certification de ces rapports de durabilité sera réalisée par les « OTI » (Organismes Tiers Indépendants) accrédités par le COFRAC.

S'agissant d'un nouveau référentiel non-comptable, il est légitime que les commissaires aux comptes ne soient pas automatiquement habilités à réaliser ces certifications. En revanche, ne pas être reconnu comme un acteur majeur de la certification devant bénéficier d'un accès simplifié à ce statut serait une aberration.

Ainsi, l'entrée des CAC sur le marché de l'audit de durabilité pourra se faire sous l'exigence de l'accomplissement d'un stage professionnel de 8 mois et la réussite d'une épreuve en matière de durabilité.

Toutefois, une clause dite du « grand-père » sera instituée dans quelques jours par décret, permettant aux commissaires aux comptes en exercice de devenir certificateur, à la condition de suivre 90 heures de formations spécifiques, décomptées de l'obligation triennale des 120 heures, pour compléter et justifier leurs compétences sur le référentiel de durabilité. Compromis sans doute perfectible, mais malgré tout salutaire et légitime.

Ensemble pour agir s'émeut toutefois de la teneur des discussions récentes entre la profession et son autorité de tutelle (le H3C, rebaptisée H2A « Haute Autorité de l'Audit ») dans lesquelles cette dernière entend limiter la faculté de bénéfice de cette clause au 1er janvier 2026. Autrement dit, les CAC devraient satisfaire l'obligation des 90 heures de formation avant cette date sous peine de voir tomber le couperet d'une expiration du régime transitoire pour les professionnels en exercice.

A la suite de la publication de l'article « CSRD : NON À UNE FRACTURE DURABLE DE LA PROFESSION COMPTABLE ! » paru le 6 octobre 2023 dans le média Compta Online, le Haut Conseil du commissariat aux comptes entend faire valoir le droit de réponse suivant :

« Il convient de préciser que les dispositions relatives à l'autorisation d'exercice de la mission de certification des rapports de durabilité dans le cadre du régime transitoire (clause dite de « grand-père ») découlent des termes de la directive CSRD.

Le projet d'ordonnance prévoit en effet des dispositions permettant aux commissaires aux comptes inscrits avant le 1er janvier 2026 ou à des salariés de prestataires de services d'assurance indépendants accrédités avant le 1er janvier 2026, de fournir la mission d'assurance des informations de durabilité sous réserve d'avoir préalablement suivi des formations homologuées par la future H2A, futur nom de l'actuel H3C.

Il n'est nullement prévu que ces formations, d'une durée de 90 heures, devront avoir été suivies avant le 1er janvier 2026. Il est donc inexact d'affirmer que l'autorité de supervision entendrait surtransposer la directive CSRD. »

Or, la directive européenne n'impose pas une telle limite, et le projet de décret relatif à ce régime transitoire ne mentionne la date du 1er janvier 2026 que comme seule date butoir d'inscription à la compagnie, et non pour la réalisation des heures de formation :

« I. Sont réputés satisfaire aux conditions prévues aux 2° et 3° du I de l'article L822-1-5 du code de commerce les commissaires aux comptes inscrits sur la liste visée au I de l'article L822-1 avant le 1er janvier 2026 et qui justifient avoir validé une ou plusieurs formations, homologuées par la Haute autorité de l'audit [...] ».

Alors que Bercy, l'autre tutelle de la profession, rehaussait les seuils et supprimait la liste des services interdits dans la loi PACTE au motif de la surtransposition d'une directive, notre régulateur entend surtransposer la directive CSRD, voilà bien une appréciation des textes européens à géométrie variable !

Ensemble pour agir s'oppose à une surtransposition de la directive européenne et, s'il est publié en l'état, à une application rigoriste du décret. Tout commissaire au compte inscrit à la Compagnie au plus tard le 1er janvier 2026 doit pouvoir réaliser les formations après cette date et bénéficier de la clause du grand-père.

En envisageant une fermeture de la clause du grand-père au 1er janvier 2026, le H2A exclut, de fait, des milliers de cabinets d'audit du marché de la certification durabilité, dont les ressources ne permettront pas d'engager le temps ni les moyens nécessaires dans un si court délai.

L'enjeu pour la profession réside aussi dans l'attractivité de nos cabinets : les futurs stagiaires s'orienteront davantage vers des maîtres de stage inscrits sur la liste des CAC habilités à certifier les informations de durabilité, sous peine de ne pouvoir bénéficier eux-mêmes de l'habilitation lors de l'obtention du DEC.

La chancellerie nous a habitué à analyser notre profession par le prisme des grands cabinets lorsque, en 2020, elle modifia les règles électorales pour leur réserver la moitié des sièges du conseil national de la Compagnie.

Exclure une majorité de cabinets au profit des « grands » acteurs de la profession de l'audit, c'est fracturer une nouvelle fois la profession, limiter l'attractivité des petits cabinets au profit des réseaux internationaux et ainsi favoriser la concentration sur quelques acteurs.

Le CAC est un certificateur !

Oui à la formation complémentaire sur la durabilité !

Non à son exclusion du marché !

Camille Boivin Gilles Bösiger

Camille Boivin

Vice-Président d'Ensemble pour agir

Gilles Bösiger

Président d'Ensemble pour agir


CSRD : non à une fracture durable de la profession comptable !


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