Bonjour,
Au-delà de mon poste de comptable unique (dans le secteur culturel), je fais l'administration d'artistes et compagnies de spectacle et j'ai là une question pour un artiste entrepreneur individuel (BNC) qui dépasse mes compétences.
Il a été mis fin à son bail commercial en 2022 et il a touché une importante prime d'éviction. Il me demande de l'aider avec ses impôts (me disant qu'un avocat lui aurait dit que tout ou partie de cette prime n'était pas imposable, je mets au conditionnel car je n'ai aucune trace écrite) mais de mon côté j'avais lu que soit c'est imposable totalement si compense une charge ou un manque à gagner soit imposable comme une plus-value si perte d'un élément d'actif.
Donc question principale, ai-je bien compris et n'y a-t-il que ces 2 régimes d'imposition, ou comme il me l'a indiqué peut-il y avoir une partie de la prime non imposable ?
Et selon cette première réponse il faudra ensuite que nous déterminions ce que compense réellement sa prime ...
D'avance merci si quelqu'un plus doué que moi en fiscalité peut nous aider !!
Elise
NB : j'ai écrit à son SIE depuis octobre, zéro réponse.
Bonjour,
Votre analyse est exacte et il y a bien lieu de vous référez à l'acte qui a prévu l'indemnité pour connaitre son mode d'imposition.
En matière de BNC, les indemnités d'éviction perçues sont en effet :
Pour se prononcer, les juges vérifient si les bénéficiaires des indemnités conservent la même clientèle et la possibilité d'exercer leur profession.
Si l'indemnité perçue est qualifiée de plus-value, elle peut être exonérée d'impôt sur le revenu en application de l'article 151 septies du Code Général des Impôts qui concerne les petites entreprises (BOFiP-BNC-BASE-30-30-30-10-03/08/2016).
Les contribuables bénéficient d'une exonération totale des plus-values professionnelles, à l'exception de celle concernant les terrains à bâtir s'ils exercent, à titre professionnel, leur activité depuis au moins 5 ans et si le volume des affaires est limité :
- les recettes annuelles HT ne doivent pas excéder 90?€?000 € (exonération totale) ou 126?€?000 € (exonération partielle). La limite d'exonération à prendre en compte s'entend de la moyenne des recettes HT, éventuellement ramenée à 12 mois, des exercices clos au cours des 2 années civiles précédant celle de la date de clôture de l'exercice de réalisation de la plus-value,
- l'activité doit avoir été exercée à titre professionnel depuis au moins 5 ans, sauf lorsque la plus-value est réalisée dans le cadre d'une procédure d'expropriation ou est consécutive à la perception d'une indemnité d'assurance. La condition liée à l'exercice professionnel de l'activité n'implique pas que le contribuable exerce sa seule activité professionnelle, ni que l'accomplissement des diligences en cause constitue sa profession principale. La durée cumulée d'exercice d'une activité successive ou conjointe dans plusieurs établissements peut être retenue pour apprécier la condition d'octroi liée à la durée d'activité.
Je reste à votre disposition pour d'autres informations,
Et vous souhaite une bonne continuation.
Bien à vous
Bonsoir,
Déjà merci pour votre réponse très complète et bien claire.
Je vais toutefois abuser de votre gentillesse pour m'aider à vérifier avec les infos de l'acte si l'on peut considérer être dans le cas où l'indemnité peut être considérée comme une plus-value. Ci-dessous un copier-coller de ce qui concerne l'indemnité dans l'acte de résiliation du bail :
"Par acte d'huissier en date du 4 février 2022, le Bailleur a signifié au Preneur le non renouvellement de son bail et lui a donné congé pour la date du 31 aout 2022, au motif que le bailleur souhaite vendre l'immeuble en ce compris le local donné en location et par conséquent mettre un terme à la
reconduction du bail susvisé."
"Cette résiliation a lieu moyennant le versement d'une indemnité par le " Bailleur " au " Preneur " d'un montant de XXXX EUROS (XXXX EUR).
Cette indemnité représente la contrepartie de la valeur du droit au bail du preneur.
Ladite indemnité se décomposera comme suit : indemnité principale de XXX € versée ce jour , indemnité secondaire de XX €, versée après la restitution des locaux loués par le " Preneur " libre de tout matériel et en bon état, et la remise des clés."
Je ne sais pas si cela a une incidence mais en gros la résiliation du bail ne prive pas dans le principe l'artiste de sa clientèle mais le prive pour le moment de pouvoir exposer ses oeuvres et donc de les vendre. Et l'oblige le temps de retrouver un autre atelier aussi grand à louer un local/appartement juste pour tout stocker.
On est bien d'accord que soit la prime est considérée dans sa globalité comme comprise dans le bénéfice imposable au taux normal soit elle est considérée comme une plus-value ? Ca ne peut pas être en partie l'un et en partie l'autre ? J'essaie vraiment de comprendre ce que lui a dit cet avocat avec lequel il ne s'est entretenu qu'à l'oral et lui a laissé penser qu'une partie de la prime ne serait pas imposable... pour savoir s'il a mal compris ou si quelque chose m'échappe.
Encore merci d'avance pour un complément potentiel de réponse.
Elise
Bonjour,
Je vous remercie pour vos précisions.
L'exposé de motif du versement de votre indemnité me laisse personnellement plutôt pencher pour l'imposition en tant que recette imposable normale et non en tant que plus-value. Le droit au bail n'a pas été acquis à l'origine et n'est pas mentionné sur votre registre des immobilisations.
Le BOI-BNC-CHAMP-10-10-20-30 du 2-3-2016 reproduit ci-dessous fait par ailleurs référence à deux décisions " similaires " à la vôtre du Conseil d'Etat en la matière :
Dans une autre décision de la Cour Administrative de NANTES n° 95-245 du 26/05/1998, l'indemnité perçue par un contribuable destinée à compenser les préjudices subis en raison de la non-application de la clause du bail professionnel lui accordant un droit de préférence lors de la vente des locaux dans lesquels il exerçait sa profession depuis six ans a été considérée par la Cour comme ayant eu pour objet de compenser les frais et charges causés par le transfert du cabinet dans un autre local et les pertes de recettes correspondantes. Dans cette affaire, le contribuable n'avait aucun droit au renouvellement de son bail. Cette indemnité constitue une recette professionnelle imposable ayant pour seule contrepartie la réparation des préjudices matériels étroitement liés à la profession, et non un préjudice moral. Cependant dans cette décision, le tribunal a admis le caractère non imposable de la moitié de l'indemnité.
Il est possible que votre avocat se réfère à cette décision pour indiquer qu'une partie seulement de l'indemnité est imposable, étant sous-entendu qu'une partie serait traitée comme une recette normalement imposable et l'autre en tant que plus-value. Ceci étant, hors le cas d'un litige avec l'administration fiscale soumis à l'arbitrage d'un juge, il me semble pas que le contribuable puisse procéder à une telle ventilation de son propre chef dans sa déclaration de résultat. Au pire, vous pourrez faire état de cette jurisprudence en cas de contestation de votre position par l'administration et l'introduction d'une instance devant le juge.
Dans votre cas, il convient à mon avis :
Je reste à votre disposition pour d'autres informations,
Et vous souhaite une bonne continuation.
Bien à vous
EXTRAIT DU BOI :
II. Indemnité d'éviction
50
L'indemnité d'éviction, perçue par un contribuable exerçant une profession non commerciale, à raison du local professionnel dont il disposait, entre dans le champ d'application des bénéfices non commerciaux et, constituant pour l'intéressé une recette professionnelle, doit, en tant que telle, être retenue pour la détermination de son bénéfice imposable.
60
Il a été jugé que, dans le cas où un contribuable qui, exerçant une activité libérale, a consenti, par convention, à être évincé des bureaux dans lesquels il avait son cabinet et, en contrepartie, a reçu une indemnité destinée à réparer le préjudice résultant du fait qu'il devait s'installer ailleurs, cette indemnité ne peut être regardée :
- ni comme la compensation d'une perte en capital ;
- ni comme une indemnité " reçue en contrepartie de la cessation de l'exercice de la profession ou du transfert d'une clientèle ", dès lors que l'intéressé avait seulement l'obligation de quitter les lieux et pouvait poursuivre ailleurs l'exercice de sa profession avec la même clientèle.
Elle constitue, dès lors, une recette professionnelle, dont il doit être tenu compte pour la détermination des bénéfices non commerciaux du contribuable (CE, arrêt du 7 juillet 1976 n° 94533 et CE, arrêt du 3 décembre 1986 n° 51458).
Bonjour,
Merci beaucoup pour toutes ces précisions, qui vont dans le sens de ce que je pressentais mais je n'avais aucune jurisprudence sur le sujet.
Ce sera a priori imposée comme une recette "normale", je vais toutefois relancer le SIE pour confirmation et tenter d'avoir l'avis soit d'un avocat spécialisé en droit fiscal.
Encore merci.
Elise
![]() |
22 Mar | Flash News CO : semaine du 20 mars 2023 |
21 Mar | Automatiser grâce aux nouvelles technologies : un tournant décisif pour les experts-comptables ? |
20 Mar | Collaborateurs : l'intelligence artificielle fera bientôt votre travail, et c'est une bonne nouvelle |
20 Mar | Mécénat ou parrainage : quelle différence ? |
20 Mar | Taxonomie verte européenne : l'essentiel à connaître |
20 Mar | Le passif éventuel : mode d'emploi |
19 Mar | Faillite de Silicon Valley Bank : la certification sans réserve deux semaines plus tôt interroge |
16 Mar | Comptabiliser l'affacturage et l'affacturage inversé |
16 Mar | Comptabiliser la sortie de l'actif d'une immobilisation détruite |
Compta Online
S'informer, partager, évoluer
Média communautaire 100% digital destiné aux professions du Chiffre
Service de presse en ligne CPPAP n°0324W94840