
Lorsque certains critères sont remplis, l'activité de location de locaux d'habitation meublés peut être considérée comme exercée à titre professionnel. Lorsque tel est le cas, un régime fiscal spécifique s'applique. Parmi les avantages fiscaux existants, le plus célèbre est sans doute la possibilité d'imputer les déficits fiscaux tirés de l'activité de location meublée sur le revenu global du foyer fiscal.
Quelles sont les conditions à réunir pour être qualifié de loueur en meublé professionnel ? Quel est le traitement fiscal des résultats générés par cette activité ? Est-il intéressant de louer en meublé ?
Cet article traite du statut de loueur en meublé professionnel (LMP). Pour plus de détails sur le statut de loueur en meublé non professionnel (LMNP), voir « Comptabilité du LMNP (loueur en meublé non professionnel) ».
Définition des loueurs en meublé professionnel
Deux conditions cumulatives sont exigées pour que l'activité de location meublée soit considérée comme exercée à titre professionnel (article 155 - IV du Code Général des Impôts ou CGI) :
- les recettes annuelles tirées de cette activité, par l'ensemble des membres du foyer fiscal sont supérieures à 23 000¤ ;
- ces recettes excèdent les revenus professionnels du foyer fiscal soumis à l'impôt sur le revenu.
Le caractère professionnel ou non de la location meublée s'apprécie au niveau du foyer fiscal.
Auparavant, une condition supplémentaire, relative à l'inscription au registre du commerce et des sociétés (RCS) était requise pour l'application du statut de LMP. Cette 3e condition, retoquée par le Conseil constitutionnel le 8 février 2018, n'est plus applicable.
Montant minimum de recettes annuelles des loueurs en meublé professionnels
Le montant annuel des recettes tirées de la location meublée, par l'ensemble des membres du foyer fiscal, doit excéder 23 000¤.
Les recettes prises en compte sont déterminées de la manière suivante :
- elles correspondent au montant brut, toutes taxes et charges comprises, des loyers acquis, par l'ensemble des membres du foyer fiscal, ainsi que, le cas échéant, les indemnités d'assurance visant à garantir les loyers ;
- lorsque la location meublée est consentie par une société de personnes, les recettes retenues sont celles qui reviennent à l'associé membre du foyer fiscal au prorata de ses droits dans les bénéfices sociaux ;
- le montant des recettes à retenir s'apprécie par année civile, y compris pour les sociétés de personnes dont l'exercice ne coïnciderait pas avec l'année civile ;
- en cas de commencement ou de cessation d'activité en cours d'année, le montant des recettes doit être ajusté prorata temporis, distinctement pour chaque immeuble. Autrement dit, il convient de réduire le montant du plafond de 23 000¤ en fonction de la durée de location (rapport d'ajustement : nombre de jours de location par rapport à 365). S'agissant de situations de commencement d'activité, le point de départ à retenir pour l'ajustement prorata temporis est la date de signature du bail [1].
Les recettes non directement liées à l'activité de location, telles que les produits financiers ou des subventions perçues pour l'acquisition du bien immobilier, ne sont pas prises en compte.
Prépondérance des recettes de location par rapport aux revenus professionnels du foyer fiscal
Les recettes annuelles tirées de l'activité de location meublée par l'ensemble des membres du foyer fiscal doivent excéder le montant total des revenus professionnels perçus par les membres dudit foyer fiscal.
Les revenus professionnels des loueurs en meublé professionnels s'entendent comme la somme des revenus nets suivants (les revenus exonérés ne sont pas pris en compte) :
- les traitements et salaires ;
- les pensions et rentes viagères ;
- les bénéfices industriels et commerciaux autres que ceux retirés de l'activité de location meublée (mais y compris ceux qui ne seraient pas perçus dans le cadre d'une activité professionnelle) ;
- les bénéfices non commerciaux ;
- les bénéfices agricoles ;
- les revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 du CGI.
Pour déterminer le montant des revenus professionnels, les revenus exonérés ne sont pas retenus.
S'agissant des déficits professionnels des LMP, ils sont pris en compte au titre de l'année au cours de laquelle ils sont réalisés, à hauteur de leur montant imputable sur le revenu global. Les déficits antérieurs ne sont pas pris en compte.
Concernant les déficits non professionnels des LMP, ils sont retenus dans les mêmes conditions que les règles qui régissent leur report, c'est-à-dire au titre de l'année au cours de laquelle ils s'imputent sur les bénéfices de même nature.
Régime d'imposition des LMP
Impôt sur les bénéfices retirés de l'activité de loueur en meublé professionnel
Les résultats de l'activité de loueur en meublé professionnel sont déterminés selon les règles de droit commun des BIC. Toutefois, les activités relevant de la location meublée de tourisme peuvent bénéficier du régime micro-BIC prévu à l'article 50-0 du CGI.
Ce régime micro s'applique tant que le chiffre d'affaires tiré de cette activité ne dépasse pas le seuil de 188 700¤ (applicable aussi pour les chambres d'hôtes). Découle de l'application du régime micro, un abattement de 71% pour le calcul de la base d'imposition des loueurs en meublé de tourisme. L'application de ce seuil aux locations meublées de tourisme relève d'une exception puisque la plupart des locations meublées sont soumises au régime micro tant que le chiffre d'affaires hors taxe n'excède pas le seuil de 77 000¤ et bénéficie d'un abattement de 50%.
Lorsque ce seuil est franchi, l'activité est soumise à un régime réel d'imposition, notamment le régime simplifié d'imposition (jusqu'à 840 000¤). Ainsi, certaines charges pourront être déduites du résultat fiscal :
- impôt locaux ;
- frais d'établissement ;
- frais d'entretien et de réparation :
- frais de gestion et d'assurance ;
- intérêt d'emprunt ;
- amortissement du mobilier et des améliorations (sur une durée allant de 5 à 10 ans, pour un taux compris entre 10% et 20% par an).
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024, le Gouvernement souhaite revoir à la baisse l'abattement pour les locations de biens meublés de tourisme classés situés en zones tendues, le faisant passer de 71% à 50%. Cette modification concernerait les revenus jusqu'à 77 700¤ sous le régime micro-BIC.
En revanche, pour les biens situés en zones non-tendues, l'abattement resterait à 71% avec toutefois une réduction du plafond de recettes à 50 000¤, contre 188 700¤ actuellement (article 5 duodecies du PLF 2024).
Par ailleurs, le projet de loi de finances ne prévoit pas de changement pour les chambres d'hôtes, celles-ci continueront de bénéficier du seuil applicable aux ventes de marchandise ainsi que de l'abattement correspondant.
Lorsque l'activité est exercée par l'intermédiaire d'une société civile immobilière, cette société est soumise à l'impôt sur les sociétés, en application de l'article 206, 2 du CGI.
Imputation des déficits des LMP
Les déficits subis sont en principe imputables sur le revenu global de l'année de réalisation dudit déficit, sans limitation de montant. Si le montant du revenu global n'est pas suffisant pour absorber l'intégralité des déficits résultant de l'activité de loueur en meublé professionnel, l'excédent de déficit est reporté successivement sur le revenu global des six années suivantes (article 156 du CGI) [2].
Il existe toutefois une exception à ce principe, lorsque les déficits proviennent d'amortissements exclus des charges déductibles. En effet, le montant déductible de l'amortissement des biens loués est limité, au titre d'un même exercice, à la différence entre le montant du loyer acquis et celui de l'ensemble des autres charges afférentes aux biens loués (i.e. frais d'entretien, d'assurances, de réparation, intérêts d'emprunt, impôts et taxes). Autrement dit, si la constatation de déficits résulte de la déduction des amortissements pratiqués au titre des biens loués, ce déficit ne sera pas imputable sur le revenu global.
Concernant les associés de sociétés de personnes, chaque associé impute sur son revenu global la quote-part du déficit social correspondant à ses droits dans la société et reporte l'excédent de déficit dans les mêmes conditions que ci-dessus.
Plus-values réalisées par les LMP
Les plus-values réalisées par les loueurs en meublé professionnel peuvent bénéficier d'une exonération, sous réserve du respect des conditions suivantes :
- l'activité de loueur en meublé professionnel est exercée depuis au moins 5 ans ;
- la moyenne des recettes tirées de la location au titre des exercices clos au cours des deux années civiles qui précèdent la date de clôture de l'exercice de réalisation de la plus-value n'excède pas le seuil de 90 000¤ hors taxes (exonération totale).
Lorsque les recettes du LMP excèdent 90 000¤ mais demeurent inférieures à 126 000¤ hors taxes, les plus-values peuvent bénéficier d'une exonération partielle, dès lors que l'activité est exercée depuis 5 ans au moins. La fraction taxable de la plus-value relève du régime des plus-values professionnelles.
Si l'une des conditions visées ci-dessus n'est pas satisfaite, l'exonération de plus-values n'est pas applicable. Les plus-values réalisées sont alors soumises au régime des plus-values professionnelles à court ou à long terme.
La TVA dans les activités des loueurs en meublé professionnel
Les locations meublées sont en principe exonérées de TVA, sauf si elles entrent dans l'une des six catégories de locations imposables suivantes :
- les prestations d'hébergement fournies dans les hôtels de tourisme classés ;
- les prestations d'hébergement fournies dans les villages vacances agréés ou classés ;
- certaines prestations d'hébergement fournies dans les résidences de tourisme classées ;
- les prestations de location meublée lorsque l'exploitant offre dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements hôteliers professionnels au moins trois des prestations suivantes : petit-déjeuner, nettoyage régulier des locaux, fourniture de linge de maison et réception de la clientèle (jusqu'à un arrêt de juillet 2023, voir encadré ci-dessous) ;
- les locations de locaux (nus, meublés ou garnis) consenties à l'exploitant d'un établissement d'hébergement entrant dans l'une des quatre catégories visées ci-dessus, à l'exclusion de celles consenties à des exploitants de certains logements-foyers ;
- les prestations d'hébergement fournies dans certains villages résidentiels de tourisme.
Les locations meublées qui ne peuvent être rattachées à aucune des prestations visées ci-dessus se trouvent obligatoirement exonérées, sans possibilité d'option.
Attention
Le Conseil d'État a jugé le régime applicable aux prestations d'hébergement fournies dans des conditions proches de l'hôtellerie partiellement non conforme à la directive TVA. En pratique, la fourniture des 4 prestations mentionnées à l'article 261 D, 4°-b du CGI ne serait plus déterminante, mais constituerait de simples indices. Des précisions sur ce point sont attendues de la Cour d'appel de Douai, à l'origine de cette décision du Conseil d'État.
Impôt locaux
La location meublée constitue une activité imposable à la cotisation foncière des entreprises (CFE) et, si les seuils de chiffre d'affaires sont dépassés, à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).
Certaines locations (essentiellement celles qui consistent à louer tout ou partie d'une habitation personnelle) échappent à ces taxes.
La loi de finances pour 2023 avait prévu dans un premier temps la suppression de la CVAE en deux temps, à savoir une diminution de moitié en 2023 puis une suppression totale en 2024.
L'article 8 du projet de loi de finances pour 2024 prévoit désormais d'aménager la suppression de la CVAE.
Ainsi, la CVAE serait supprimée en 2024 pour les entreprises assujetties à la cotisation minimum, à savoir lorsque le montant annuel n'excéderait pas 63¤.
Pour les autres entreprises, la suppression de la CVAE ferait l'objet d'un étalement sur 4 années, durant lesquelles le taux serait progressivement abaissé, impliquant une suppression totale en 2027.
Corrélativement à la baisse de la CVAE, la taxe additionnelle à la CVAE serait ajustée pour préserver les ressources des chambres du commerce et de l'industrie. Le taux de cette taxe serait fixé à :
- 9,23% au titre de l'année 2024 ;
- 13,84% au titre de l'année 2025 ;
- 27,68% au titre de l'année 2026.
Impôt sur la fortune immobilière (IFI)
Les loueurs en meublé professionnels n'exerçant pas leur activité par l'intermédiaire d'une société (exercice en direct de l'activité) bénéficient en principe d'une exonération d'IFI, les biens immobiliers étant ici considérés comme affectés à l'activité commerciale du loueur.
En cas d'exercice de l'activité par l'intermédiaire d'une société, l'exonération d'IFI n'est pas applicable, dès lors que les activités de gestion de leur propre patrimoine par les sociétés ne sont pas considérées comme des activités commerciales éligibles à l'exonération au sens des dispositions de l'article 966 du CGI.
[1] Position énoncée par la décision CAA Lyon du 29/08/2013 n°12LY03152. Cette décision est contraire à la doctrine administrative qui retient la date d'acquisition ou d'achèvement de l'immeuble comme point de départ.
[2] Les déficits provenant de la location meublée exercée à titre non professionnel ne peuvent pas s'imputer sur le revenu global mais uniquement sur les revenus d'activité de location meublée exercée à titre non professionnel des dix années suivantes.