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Le stress au travail

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Catégorie : Actualité sociale
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Le stress professionnel est un problème majeur au sein des entreprises, depuis une quinzaine d'années. Ce sont essentiellement les femmes et les cadres qui sont touchés par ce problème.

Le stress au travail se définit comme étant un déséquilibre entre les contraintes d'une personne, liées à son environnement, et la perception de ses ressources pour y faire face.

Ce problème est mis de plus en plus en avant au fil des années, mais qui reste un vrai fléau dans le monde du travail. Et pourtant, ce n'est pas la jurisprudence qui manque en la matière. D'ailleurs, des efforts incombent aux entreprises au niveau de la prévention des risques psychosociaux. Mais ces efforts sont-ils réellement respectés ?

 

La réalité du stress au travail



Les facteurs de stress au travail

Chacun réagit de manière différente face au stress. Tout dépend de la manière dont les choses peuvent être perçues, mais également du caractère de chacun. Mais en tout état de cause, le stress est constitué de plusieurs facteurs.

Le travail

Il faut tenir compte du travail d'une manière quantitative mais également de l'aspect temporel. Pour faire simple, gérer une quantité importante de tâches tout en ayant des échéances à respecter est un facteur propice à générer du stress.

L'organisation

Le fait de travailler sans planification des tâches accroît le risque d'oubli et par conséquent, augmente le stress. Mais il y a aussi les nouvelles méthodes organisationnelles qui sont en ligne de mire. Par exemple, les entreprises qui fonctionnent selon la méthode du « just in time » autrement dit en flux tendu. Les structures n'ont pas droit à l'erreur au niveau des quantités, sous peine de se retrouver sans marchandises à proposer à leurs clients.

Le relationnel

Certaines entreprises appliquent des modèles de leadership peu participatif, voire autoritaire. Ainsi, la distinction entre la direction et les employés est accrue. Pas de communication mise en avant, et un fossé se creuse. Si l'on ajoute à cela, une absence de reconnaissance du travail fait, de vraies tensions se créent.

L'environnement au travail

Des structures ayant des locaux ou des postes de travail mal conçus, ne sont pas des conditions adéquates pour travailler. Aujourd'hui, l'on parle beaucoup des "open space". Ces espaces dans lesquels sont regroupés des dizaines de personnes, provoquent des nuisances au niveau des individus notamment le bruit.

La « santé » de l'entreprise

Certaines entreprises connaissent des soucis au niveau économique. Cela est d'autant plus fréquent lorsqu'il y a une forte concurrence dans un secteur d'activité, notamment avec les pays émergents. L'entreprise tente de s'aligner sur les produits proposés sur le marché. Mais dans ces conditions, la tâche est très difficile et bien souvent, une pression supplémentaire pèse sur les épaules des salariés, mais également de la direction.

A ces facteurs, il faudrait également ajouter les nouvelles technologies. En effet, avec l'arrivée des smartphone, d'internet, et surtout des mails, il est possible de rester connecté à son travail 24 heures sur 24. C'est pourquoi, il est de plus en plus fréquent d'entendre parler des NTIC (Nouvelles Technologies de l'Information et de Communication) et de stress au travail. Il n'y a plus de frontière entre vie privée et vie professionnelle.

Les symptômes du stress au travail

Le stress au travail ne se déclare pas du jour au lendemain. Cette situation naît d'une accumulation de facteurs. Selon le caractère de chacun, le stress apparaîtra par le biais d'un ou plusieurs symptômes, sous forme de trois phases.

La première phase est la réaction d'alarme. Le corps réagit par l'augmentation de la fréquence cardiaque, de la tension artérielle.

La seconde phase est la résistance. Ici, l'organisme se prépare à répondre au stress.

La dernière phase est l'épuisement. Le stress est considéré comme chronique. L'organisme est sollicité en permanence.

Dès lors, les symptômes apparaissent sous différentes formes

Symptômes physiques

Les troubles du sommeil, perte de l'appétit, migraines,...

Symptômes émotionnels

Accroissement de la sensibilité et de la nervosité, crises de larmes, crises de nerfs, angoisse,...

Symptômes intellectuels

Difficultés de concentration, oublis,...

Symptômes comportementaux

Comportement agressif voire violent, isolement social, consommation de produits calmants (somnifères, antidépresseurs,...) ou de produits excitants (tabac, café, alcool,...)

Dès lors, une accumulation des symptômes liés à l'anxiété, sont mis en relation directe avec la dépression.

Les conséquences pour l'entreprise

Aujourd'hui, le stress au travail est considéré comme un danger économique. A cela deux raisons.

Tout d'abord, le stress a des conséquences néfastes du fait d'un absentéisme accru. Il y a donc deux répercussions importantes :

  • Au niveau du coût en termes de frais de santé. Cela a une incidence directe sur les budgets de la sécurité sociale, du fait de la prise en charge des frais de santé mais également de l'indemnité journalière à verser au salarié en arrêt.

 

  • Au niveau des absences qu'il faut pallier. Cela entraîne une perte de la productivité, mais également un fort turn over. Avec le maintien de salaire applicable en cas d'arrêt maladie, l'entreprise est dans l'obligation de verser une partie du salaire de l'employé absent. Une charge non négligeable, tout en sachant qu'il faut bien souvent embaucher un autre salarié afin de remplacer celui absent. D'ailleurs les statistiques sur le sujet, sont sans appel. Selon l'institut américain du stress, le coût lié directement au stress au travail, s'élevait à 300 milliards de dollars, rien que pour l'année 2006 aux Etats-Unis.

Au-delà de l'absentéisme, il faut également tenir compte d'une violence accrue. Comme nous l'avons vu dans les symptômes, la violence est une des réactions de l'être humain pour faire face à un excès d'anxiété. La violence fait naître des situations de harcèlement. C'est ce qui s'est passé avec la crise des suicides chez France Télécom. Les salariés poussés à des limites extrêmes, du fait de méthodes managériales basées sur le harcèlement moral, en arrivent à se suicider.

Mais avant d'en arriver à ce stade, il faut mettre en œuvre différents moyens pour limiter le stress au travail tant au niveau du salarié, qu'au niveau de l'employeur.

 

Les moyens mis en oeuvre



Que prévoit la législation ?

Au niveau de la législation française, les premières avancées apparaissent avec un décret paru le 05 Novembre 2001 (décret n°2001-1016 portant création d'un document relatif à l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs). Ce texte instaure la création d'un document d'évaluation des risques pour chaque poste d'une entreprise. Le but de ce décret est de faire prendre conscience aux employeurs des risques, quels qu'ils soient, encourus par un salarié y compris au niveau du stress au travail. C'est pourquoi, ce document doit être mis à jour chaque année, à l'initiative de l'employeur.

Mais plus spécifiquement au stress, un accord européen a été signé avec les partenaires sociaux en date du 08 Octobre 2004. Ce document a permis d'attirer l'attention sur les risques directement liés au stress mais également sur les mesures à mettre en œuvre pour les prévenir. Cet accord a été transposé en droit français par l'accord interprofessionnel du 02 Juillet 2008 portant sur le stress au travail, et rendu obligatoire à tous les employeurs le 23 avril 2009. Ce document est constitué de plusieurs points avec notamment :

  • la description du stress ; 
  • l'identification des problèmes ;
  • les responsabilités des employeurs et des salariés ;
  • la prévention du stress ;
  • etc.

Le stress au travail apparaît également, mais de manière indirecte, dans le Code du travail aux articles L4121-1 et L4121-5, au niveau de la santé et la sécurité au travail.

En plus, des textes légaux qu'ils soient européens ou français, le stress est également pris en compte dans certaines conventions collectives. C'est notamment le cas avec la convention collective nationale des télécommunications (IDCC 2148) dans un accord daté du 27 mai 2010. Le stress y est abordé dans son ensemble : identification des facteurs, mesures de prévention, formation à la prévention du stress professionnel, responsabilité des employeurs,... C'est un problème qui est de plus en plus mis en avant dans les entreprises, et avec lequel il faut s'adapter au niveau organisationnel.

Quelques jurisprudences en la matière

Très rapidement, les juges ont dû se prononcer sur ce nouveau type d'infraction. C'est pourquoi, depuis ces dernières années, de nombreuses décisions font jurisprudence qu'elles soient directement liées au stress au travail ou pas (harcèlement moral, violence).

Dès 2000, c'est un suicide qui fait jurisprudence. Une affaire médiatisée au sujet d'un salarié qui avait vu ses conditions de travail se dégrader jusqu'à en arriver au suicide. C'est ainsi, qu'il a été question d'assimiler le suicide, à un accident du travail, du fait des pressions psychologiques exercées par l'employeur (Affaire Brucker, Cour d'Appel de Riom le 22 février 2000).

Plusieurs autres décisions ont été dans ce sens, mais c'est en 2002 que les Conseils des Prud'hommes et les Tribunaux Correctionnels ont été obligé de faire une mise au point. Les condamnations au titre du harcèlement moral, étant utilisées de manière excessive, il a fallu recadrer cette infraction. C'est pourquoi, il a été spécifié que la qualification de harcèlement moral doit revêtir un caractère d'habitude. Ce terme peut se définir comme la soumission « sans répit à des attaques incessantes et réitérées ». C'est donc le TGI de Paris du 25 octobre 2002 (31ème chambre correctionnelle) n°0206301288, qui a permis de faire la distinction entre harcèlement moral et situation stressante dans l'entreprise.

Dès lors, les décisions rendues par les Tribunaux ne cessent d'être en augmentation. A titre d'exemple, nous pouvons citer une décision de la Cour d'Appel de Dijon. Elle indique le commentaire suivant dans le cadre d'une affaire de dégradation des conditions de travail : « de stress quotidien et insinueux, de peur, amplifiée les derniers mois et mettant en cause des attaques personnelles et mensongères visant leurs compétences professionnelles» (Affaire Stenger, Cour d'Appel de Dijon le 08 octobre 2003). C'est ainsi que le stress professionnel va prendre de l'ampleur au fil des années. Et ce, grâce à différentes décisions de justice qui vont permettre de cadrer ce nouveau type d'infraction.

Mais c'est l'affaire des suicides chez France Télécom qui a été l'élément déclencheur dans l'esprit du grand public. C'est ainsi, qu'aujourd'hui, lors d'une recherche des décisions de justice avec pour mot clé « stress » rien que sur l'année en cours, l'on obtient pas moins de 57 réponses. Chose quasi impensable, il y a une dizaine d'années à peine.

Le constat au sein des entreprises

Même si ce problème a pris de l'ampleur, il n'empêche que les entreprises ont du mal à prendre en compte le stress professionnel au sein de leur activité. Pourtant ce ne sont pas les textes juridiques qui manquent, ni les jurisprudences en la matière. Malgré cela, il est constaté qu'une forte majorité d'entreprises se cantonnent à faire le strict minimum. Pourtant les jurisprudences sont de plus en plus sévères avec les entreprises fautives (le suicide d'un salarié de chez Renault en 2007, assimilé à un accident du travail par la Cour d'Appel de Versailles ou encore, la faute inexcusable reconnue pour Renault dans un cas similaire en 2006).

Le stress professionnel est considéré comme un phénomène durable et dont l'ampleur est exponentielle. Les entreprises font des efforts non pas dans le but de protéger leurs salariés, mais pour être dans la légalité.

Pourtant en 2009, Xavier DARCOS à l'époque ministre du Travail, avait annoncé un plan d'urgence pour la prévention du stress au travail. Les entreprises de plus de 1000 salariés étaient les principales concernées par les mesures mises en place. Mais le bilan est sans appel : sur 1500 entreprises concernées par ce plan, un peu plus de 200 accords ont été recensés. Soit un peu plus de 13% des entreprises de plus de 1000 salariés, ont joué le jeu. Un ratio très faible au vu des effets d'annonce faites par le Gouvernement.

Même si le stress professionnel est un problème avéré, il a du mal à être reconnu. D'ailleurs, bien souvent, les employeurs ne le font pas apparaître dans le document d'évaluation des risques professionnels. Le Gouvernement en a pris pleinement conscience après l'affaire des suicides chez France Télécom. C'est pourquoi des actions de communication ont été mises en place. Notamment à la suite du plan d'urgence, le Ministère du travail n'ayant pas obtenu toutes les réponses requises, a mis en ligne sur son site la liste des bons et des mauvais « élèves ». Cela n'a pas été apprécié par les entreprises, et c'est pour cette raison que le listing a été très rapidement retiré (20 minutes : stress au travail le Gouvernement supprime sa liste rouge). En plus de cette liste des entreprises, le Gouvernement a également créé un site internet Travailler-mieux.gouv.fr (site qui n'existe plus en 2016). On y trouvait notamment, une page sur les risques psychosociaux.

Toutes ces mesures vont dans le bon sens, et visent à faire évoluer les choses. Mais tout dépendra de l'évolution des mentalités face au stress professionnel.

Il faut tout de même noter que si l'employeur est considéré comme responsable des conditions de travail au sein de son entreprise, il incombe au salarié d'alerter et de mettre en œuvre différents procédés afin d'atténuer la situation de stress : le sport, une alimentation saine,... Tout cela est indépendant de la responsabilité de l'employeur.

Vénaïg Le Bris

Vénaïg Le Bris est diplômée d'expertise comptable et inscrite à l'Ordre des experts-comptables de Bretagne.


Le stress au travail


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