BanStat
Logo Compta Online

Conventions de trésorerie intragroupes : notion et contraintes juridiques

321 194 lectures
2 commentaires
Catégorie : Actualité fiscale et droit des sociétés
Conventions de trésorerie intragroupes

La gestion de la trésorerie est centralisée dans la plupart des groupes de sociétés. Le but de cette centralisation est de rationaliser le flux et de réduire les frais financiers et les risques au sein du groupe.

Différentes méthodes peuvent être utilisées comme le netting (simple compensation) ou le cash pooling (traduire par centralisation de trésorerie) qui peut prendre différentes formes.

Si les conventions de trésorerie intragroupes sont relativement courantes, elles obligent à se poser un certain nombre de questions en pratique.

En présence d'une convention de trésorerie, la trésorerie est gérée soit par la société mère (convention de trésorerie mère fille), soit par une autre société pivot.

Cette organisation particulière permet de mieux gérer les besoins de trésorerie (et les excédents de trésorerie) des différentes entités du groupe, parfois en limitant les flux financiers grâce à la compensation.

Qu'est-ce qu'un groupe de sociétés ?

Un groupe de sociétés est une entité économique formée par une société contrôlante, « la société mère », et l'ensemble des sociétés qu'elle contrôle.

 

Quel est le fondement juridique de ces conventions ?

Les prêts et emprunts entre deux entreprises sont en principe des opérations de banque, réservées aux établissements de crédit en vertu de la loi bancaire de 1984.

Plusieurs exceptions ont toutefois été prévues par l'article L511-7, 3° du code monétaire et financier qui précise que le monopole bancaire ne peut interdire de :

Procéder à des opérations de trésorerie avec des sociétés ayant avec elle, directement ou indirectement, des liens de capital conférant à l'une des entreprises liées un pouvoir de contrôle effectif sur les autres.

 

Quelles formes peut prendre la gestion de trésorerie dans un groupe ?

La gestion de trésorerie dans un groupe de sociétés peut prendre plusieurs formes. La plus simple est probablement ce que l'on appelle le netting. Une simple technique de compensation des règlements entre sociétés du groupe, bilatérale ou multilatérale. Cette technique permet de limiter les frais financiers et de transmettre à chaque filiale, des flux libellés dans sa propre devise.

La seconde technique est le cash-pooling ou centralisation de trésorerie. C'est une compensation des soldes créditeurs et débiteurs des comptes bancaires de toutes les sociétés du groupe avec soit une fusion d'échelles pour diminuer les intérêts débiteurs calculés sur des comptes ouverts dans une même banque, soit d'une véritable centralisation, par exemple à l'aide d'un compte pivot.

Les comptes courants secondaires peuvent alors être mis à zéro de manière systématique (cash-pooling zéro balance), faire l'objet d'un transfert de fonds de sécurité après leur mise à zéro (cash-pooling target balance) ou faire l'objet d'une mise à zéro lorsqu'un seuil de déclenchement est dépassé (cash-pooling trigger balance).

La même centralisation peut se faire devise par devise, être directe ou indirecte (passer par des comptes reflets dont le solde est l'inverse de celui du compte pivot) et même faire l'objet de transferts automatiques de fonds.

 

Qu'est-ce qu'une « société pivot » ?

On distingue généralement la convention dite de pool qui permet de centraliser les soldes de trésorerie via la société pivot de la convention d'omnium. Dans la première, les filiales conservent une certaine autonomie financière alors que dans la seconde, la société pivot dispose d'un mandat pour gérer toutes les opérations de trésorerie du groupe.

Dans certains groupes, cette société pivot devient même un véritable établissement financier.

La société pivot est alors mandatée par les autres sociétés du groupe pour gérer leur trésorerie. 

Son objet social doit être compatible avec cette activité de centralisation de trésorerie qui doit figurer dans ses statuts.

 

À quoi sert la convention de trésorerie intragroupe ?

Outre une meilleure gestion financière du groupe, la convention de trésorerie permet de mieux maîtriser certains risques juridiques et fiscaux. Ainsi elle :

  • permet d'écarter la responsabilité délictuelle (civile) des dirigeants en matière d'abus de majorité ;
  • permet d'éviter le risque pénal d'abus de biens sociaux (ABS) pour les dirigeants ;
  • contribue efficacement à écarter la notion de confusion de patrimoine ou de direction de fait en cas de cessation de paiements de la filiale ;
  • est opposable pleinement à l'administration fiscale, qui ne peut invoquer la notion de distribution irrégulière dans le cadre des avances intragroupes.

 

Quelles sont les conditions de formalisme à respecter pour la mise en place d'une convention de trésorerie intragroupe ?

Au plan formel, rédiger une convention de trésorerie nécessite d'intégrer un certain nombre de mentions. Ainsi, il faudra parfois :

  • prévoir un préambule dans les conventions de trésorerie qui permet de positionner la société mandataire dans le groupe, et de rappeler la mission, en tant que mandatée, de la société pivot ;
  • faire référence à l'article 511-7 du code monétaire et financier ;
  • définir les conditions d'utilisation des fonds avancés à la société pivot ;
  • définir la périodicité des remontées, ainsi que les conditions et la durée des remboursements ;
  • fixer les modalités de rémunération des avances reçues et des prêts accordés.

Certains y ajoutent le fait que l'indépendance des autres sociétés du groupe doit figurer dans la convention et pouvoir être prouvée, surtout lorsqu'une des filiales est en difficulté (procédures collectives).

Hors cas des opérations courantes, l'autorisation du conseil d'administration ou du conseil de surveillance sera parfois nécessaire pour utiliser les fonds disponibles.

 

Les avances sont-elles obligatoirement rémunérées ?

L'article 223 B du CGI alinéa prévoit que : 

« L'avantage consenti entre des sociétés du groupe résultant de la livraison de biens autres que ceux composant l'actif immobilisé ou de la prestation de services, pour un prix inférieur à leur valeur réelle mais au moins égal à leur prix de revient, n'est pas pris en compte pour la détermination du bénéfice net mentionné aux 1 et 2 de l'article 38 et ne constitue pas un revenu distribué ».

Cette disposition introduite par la loi de finances pour 2019 implique une rémunération minimale de ces avances. Les subventions et abandons de créance intragroupes ne sont plus neutralisés dans le résultat d'ensemble du groupe.

En vertu de ces dispositions et des commentaires publiés au BOFiP, les prêts et avances consentis entre sociétés d'un même groupe fiscal sont considérés comme des prestations de services.

Le taux d'un prêt ou d'une avance peut être fixé à un taux compris entre :

  • le taux du marché (ou le taux que l'entreprise emprunteur aurait pu obtenir d'un établissement financier dans des conditions similaires) ;
  • et le taux qui correspond aux sommes éventuellement empruntées par la société prêteuse.

Dans le second cas, l'entité prêteuse doit soit justifier qu'elle a contracté une dette spécifique pour ce prêt, soit estimer la rémunération en fonction du taux qu'elle aurait obtenu si elle avait placé cette somme. Le taux Euribor 3 mois peut servir de référence (voir en ce sens BOI-IS-GPE-20-20-40 n°270 et suivants).

 

Faut-il soumettre les intérêts à TVA ?

Les opérations financières sont en principe exonérées de taxe sur la valeur ajoutée.

À l'inverse, toutes les prestations intragroupes qui correspondent à un service ou une prestation de gestion de cette trésorerie sont soumises à TVA. C'est valable autant pour la société mère qui peut être amenée à facturer ce type de prestations que pour la société pivot.

 

Les conventions de trésorerie sont-elles des conventions réglementées ?

Les avances de trésorerie dans les groupes sont plutôt naturelles. En revanche, l'appréciation du caractère normal de l'opération est souvent plus délicate.

Elles doivent être soumises à la procédure des conventions par principe et ce, notamment pour écarter l'action ultérieure sur le fondement de l'abus de majorité en présence d'un litige.

Ce n'est que lorsque le groupe peut établir que ces conventions sont courantes et conclues à des conditions normales que la procédure des conventions réglementées peut être écartée.

La CNCC, après consultation de l'Afep et du Medef et en concertation avec le H3C ainsi que l'AMF, a énuméré dans une étude sur les conventions réglementées et courantes, un certain nombre de conventions courantes à l'intérieur d'un groupe et indiqué les conditions qui pourraient être considérées comme normales pour chacune d'elles (pour plus de précisions voir l'étude de la CNCC, Les conventions réglementées et courantes, 2014).

Fichier à télécharger

Les conventions régelmentées et courantes - CNCC- février 2014

Quelles sont les conventions réglementées ?

Les conventions réglementées sont les contrats ou conventions conclus entre les sociétés et leurs associés ou dirigeants (ou certains membres de la famille de ces associés et dirigeants).


Le 14/09/2020 13:49, Jex94 a écrit :
  

Bonjour, je vous propose une petite mise à jour du "Conseil n°4" : La loi Art 32 traitant de la réforme de l'intégration fiscale a mis fin aux neutralisations dans le résultat d'ensemble du Groupe des subventions directes et indirectes, depuis les exercices ouverts au 01/01/2019. Bien cordialement, Jex94.


Le 14/09/2020 17:53, Sandra Schmidt a écrit :
  
  • Bonjour, je vous propose une petite mise à jour du "Conseil n°4" : La loi Art 32 traitant de la réforme de l'intégration fiscale a mis fin aux neutralisations dans le résultat d'ensemble du Groupe des subventions directes et indirectes, depuis les exercices ouverts au 01/01/2019. Bien cordialement, Jex94.

Bonjour Jex94,

Merci pour ce rappel. Effectivement, l'article n'est plus du tout à jour.

Bien cordialement,

Sandra



Conventions de trésorerie intragroupes : notion et contraintes juridiques


© 2024 Compta Online
Retour en haut