Prime de partage de la valeur : les modalités de mise en œuvre

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Modifié le 09/03/2025
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La loi du 16 août 2022 portant sur les mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat a remplacé la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat (PEPA), encore appelée parfois « prime Macron 2023 », par la « prime de partage de la valeur » (PPV).

Cette prime est basée sur le même principe que la prime PEPA : exonération de charges sociales pour encourager les employeurs à la verser auprès de leurs salariés, mais ce n'est pas une obligation.

La PPV peut être versée depuis le 1er juillet 2022.

La loi « Partage de la valeur » (loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023) instaure un nouveau dispositif, distinct de la PPV, à destination des salariés ayant au moins 1 an d'ancienneté : le « plan de partage de la valorisation de l'entreprise » (PPVE). Il leur permet de bénéficier d'une prime en cas d'augmentation de la valeur de l'entreprise. Cette prime peut être placée sur un plan d'épargne salariale. Un décret, entré en vigueur le 1er juillet 2024, a fixé les conditions de mise en ½uvre du dispositif de PPVE et, plus largement, de la loi dans son entier (décret n°2024-644, 29 juin 2024).

Car, en effet, pour les PME, cette loi comprend d'autres mesures permettant d'étendre le partage de la valeur. Les entreprises de moins de 50 salariés peuvent volontairement mettre en place un dispositif de participation moins contraignant que la formule légale.

En outre, depuis le 1er janvier 2025, les entreprises de 11 à 49 salariés qui ne sont pas obligées de mettre en place de la participation mais qui réalisent des bénéfices réguliers (bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % du chiffre d'affaires pendant 3 exercices), ont désormais l'obligation de prévoir un dispositif de partage de la valeur dont la prime de partage de la valeur (ou l'intéressement, la participation, l'abondement sur un plan d'épargne). Le décret n° 2024-690 du 5 juillet 2024 précise les modalités de calcul du seuil de 11 salariés.

La prime de partage de la valeur est en outre facilitée, offrant une exonération fiscale et sociale sous certaines conditions jusqu'à fin 2026 (des précisions sont apportées en fin d'article).

Enfin, cette loi instaure également une augmentation des plafonds d'attribution des actions gratuites et promeut une épargne verte, solidaire et responsable, en intégrant des critères de financement de la transition énergétique et écologique dans les plans d'épargne entreprise (PEE) et retraite (PER).

Ces dispositions, expérimentales pour 5 ans, feront l'objet d'un bilan et d'un suivi annuel par le Gouvernement.

En juin et juillet 2024, le Ministère du travail a publié plusieurs FAQ concernant certaines des nouvelles obligations, les cas échéant prévues à titre expérimental, en matière de partage de la valeur contenues dans la loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023 :

  • la première FAQ porte sur l'expérimentation d'un régime de participation dérogatoire pour les entreprises de moins de 50 salariés, permettant des formules de participation négociées, potentiellement plus ou moins favorables que la formule légale ;
  • la deuxième FAQ traite du dispositif de partage de la valeur sous conditions de rentabilité (partage d'une partie du bénéfice en cas de réalisation de bénéfices réguliers pendant 3 exercices consécutifs) ;
  • la troisième FAQ concerne l'obligation pour les entreprises de plus de 50 salariés, avec au moins un délégué syndical, de négocier le partage de la valeur en cas d'augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal.

Le 9 octobre 2024, le Ministère du Travail a également publié un guide sous forme de questions-réponses afin d'apporter des clarifications sur les avances d'intéressement et de participation, répondant ainsi aux interrogations des entreprises et des salariés.

Selon la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2025, publiée au JO du 28 février 2025, la PPV est désormais incluse dans le coefficient et dans l'assiette de calcul de la réduction générale des cotisations sociales patronales.

Les exonérations sociales et fiscales associées à cette prime restent en vigueur jusqu'au 31 décembre 2026. A compter du 1er janvier 2027, seules les primes affectées à un plan d'épargne pourront bénéficier d'une exonération fiscale.

Les salariés concernés par la prime de partage de la valeur

La prime de partage de la valeur s'applique aux salariés liés par un contrat de travail, aux intérimaires mis à disposition de l'entreprise utilisatrice octroyant cette prime, aux agents publics relevant de l'établissement public et aux travailleurs en situation de handicap liés à un Esat par un contrat d'accompagnement par le travail, soit :

  • à la date de versement de la prime ;
  • à la date de dépôt de l'accord ;
  • à la date de signature de la décision unilatérale de l'employeur précisant les modalités de versement de la prime.

Les salariés doivent être sous contrat CDI, CDD, à temps plein ou à temps partiel, contrat d'apprentissage ou de professionnalisation.

Les stagiaires ne peuvent pas bénéficier de cette prime.

Entreprises concernées par le versement de cette prime de partage de la valeur

Toutes les entreprises peuvent décider de verser cette prime PPV.

Les employeurs de droit privé

  • entreprise, quels que soient son effectif et son statut : société, artisan-commerçant indépendant, profession libérale ; 
  • association ;
  • fondation ; 
  • syndicat ;
  • mutuelle,...

Les établissements publics à caractère industriel et commercial

  • France Télévision ; 
  • INA ;
  • Opéra de Paris ;
  • RATP,...

Les établissements publics administratifs employant du personnel de droit privé

  • agences régionales de santé ; 
  • Caisses nationales de Sécurité sociale ; 
  • France Travail (ex-Pôle emploi),...

Quand les conditions de l'exonération sont remplies, la mesure s'applique au titre de la prime de partage de la valeur versée :

  • par les entreprises de travail temporaire aux salariés intérimaires lorsque l'entreprise utilisatrice verse une prime à ses salariés ;
  • par les établissements ou services d'accompagnement par le travail (Esat) aux travailleurs en situation de handicap sous contrat d'accompagnement par le travail.

Modulation du montant de la prime de partage de la valeur 

Le montant de la prime peut être modulé selon les bénéficiaires en fonction des critères suivants :

  • la rémunération ;
  • l'ancienneté dans l'entreprise ;
  • le niveau de classification ;
  • la durée de présence effective pendant l'année écoulée ou la durée de travail au contrat de travail, telle que déterminée pour le calcul du coefficient de la réduction générale des cotisations patronales.

Congés et absences : quelles incidences sur la prime ?

Les congés maternité, paternité, adoption et éducation des enfants ainsi que les congés pour enfant malade et de présence parentale sont assimilés à des périodes de présence effective pour la détermination du montant de la prime. Ces congés ne peuvent pas avoir pour effet de réduire le montant de la prime.

Prime de partage de la valeur et exonération

L'exonération de cotisations et contributions de la prime partage de la valeur en 2025 est, comme en 2024 et 2023, applicable dans la limite de 3 000¤ ou 6 000¤ par bénéficiaire et par année civile sous condition de la date de versement de la prime et du montant de rémunération du salarié.

Rappel

Entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023, toute prime versée sur cette période à un salarié ayant perçu, au cours des 12 derniers mois, une rémunération inférieure à 3 fois le SMIC annuel, est exonérée de toutes les cotisations et contributions sociales patronales et salariales, dont la CSG et la CRDS. La prime est également exonérée d'impôt sur le revenu.

Pour une rémunération annuelle supérieure ou égale à 3 SMIC annuels, l'exonération de cotisations et contributions sociales patronales et salariales ne porte pas sur la CSG-CRDS. La prime est également assujettie au forfait social dans les conditions applicables à l'intéressement et imposable à l'impôt sur le revenu pour le salarié.

Le régime des exonérations fiscales et sociales a été sensiblement modifié à compter du 1er janvier 2024.

Le BOSS a créé une nouvelle rubrique, en vigueur au 1er février 2025, dédiée à l'épargne salariale dans laquelle il traite du dispositif de la prime de partage de la valeur applicable depuis le 1er janvier 2024. Le Questions-réponses est abrogé mais reste disponible pour les modalités applicables jusqu'au 31 décembre 2023.

Le montant maximum d'exonération : 3 000¤ ou 6 000¤ ?

La prime de partage de valeur est exonérée dans la limite de 3 000¤ par bénéficiaire et par année civile.

Ce montant est porté à 6 000¤ par an et par bénéficiaire pour les employeurs qui mettent en ½uvre :

  • un dispositif d'intéressement alors même qu'ils sont déjà soumis à l'obligation de mise en place de la participation ;
  • un dispositif d'intéressement ou de participation volontaire alors même qu'ils ne sont pas soumis à l'obligation de mise en place de la participation.

Ces dispositifs doivent être mis en ½uvre à la date de versement de la prime ou être conclus au titre du même exercice que celui de la participation.

Sont exemptées de ces conditions les associations et fondations auxquelles peuvent êtres faits des dons permettant d'ouvrir droit à réduction d'impôts et les Esat au titre des primes versées aux travailleurs en situation de handicap.

Les conditions de versement de la prime de partage de la valeur exonérée et défiscalisée depuis le 1er janvier 2024

L'exonération de cotisations sociales salariales et patronales et d'impôt sur le revenu est totale sous conditions, entraînant une défiscalisation de la prime.

C'est une prime supplémentaire qui ne doit pas remplacer un élément de rémunération déjà prévu par le contrat de travail ou les accords collectifs.

Son attribution ne peut pas non plus remplacer l'intéressement des salariés et elle ne peut être majorée pour les salariés qui dépassent la durée légale du travail, soit 35 heures par semaine.

Le versement de la prime peut être réalisé en une ou plusieurs fois, dans la limite d'une fois par trimestre, au cours de l'année civile.

La PPV peut aussi faire l'objet d'une avance dans les mêmes conditions que le salaire.

La mise en ½uvre de cette prime peut passer par un accord d'entreprise, signé entre les syndicats et l'employeur, ou par décision unilatérale de l'employeur. C'est dans cet accord ou cette décision unilatérale que doivent être formalisées les modalités de versements ainsi que les critères choisis.

Fichier à télécharger

La CPME met à disposition un modèle de trame de décision unilatérale de l'employeur à adapter et décliner dans l'entreprise.

Attention

Ce modèle de décision unilatérale de l'employeur est un exemple qui vous est donné à titre indicatif et ne vous dispense pas de faire appel à un conseil.

La loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023 modifie les conditions de versement et d'exonération de la PPV. Désormais, cette prime peut être octroyée 2 fois par an maximum, sans dépasser les plafonds totaux d'exonération de 3 000¤ ou 6 000¤.

Chaque prime attribuée étant unique, il faut, pour chacune d'elle, conclure un accord d'entreprise ou prévoir une décision unilatérale (avec des conditions d'attribution qui pourront être différentes d'une prime à l'autre). Ainsi, dans ce cas, contrairement au régime précédent, deux versements pourront intervenir au cours d'un même trimestre à condition, précise le BOSS, qu'ils restent chacun rattachés à leur prime.

La prime peut également être investie dans un plan d'épargne salariale (et ainsi être exonérée d'impôt sur le revenu) et est accessible à tous les employés.

Le salarié doit être informé de la possibilité d'affectation ou de la disponibilité de la prime à chaque versement. Toutefois, il peut être interrogé une fois par an lors du 1er versement et revenir sur son choix avant le versement sur le plan. S'il ne choisit pas entre l'un ou l'autre, la prime lui est directement versée.

Attention

Un décret en vigueur à compter du 1er juillet 2024 est venu fixer les conditions de versement de la PPV sur ces plans (décret n°2024-644, 29 juin 2024, art. 1er). Ainsi, la demande du salarié d'affecter les sommes dues au titre de la PPV sur un plan d'épargne doit être effectuée dans un délai de 15 jours maximum à compter de la réception du document l'informant du montant qui leur est attribué.

Le règlement du plan d'épargne doit ainsi être modifié par les entreprises. Toutefois, la prime versée peut être versée sur le plan d'épargne même non modifié.

L'abondement de l'employeur n'est possible que si le règlement le prévoit.

Par ailleurs, les sommes ainsi versées au titre de la PPV font l'objet d'une fiche distincte du bulletin de paie (contenant plusieurs mentions obligatoires), remise au salarié par voie électronique à moins que celui-ci ne s'y oppose.

Les règles d'exonération sont les suivantes :

Pour les employés gagnant plus de 3 fois le SMIC ou travaillant dans une entreprise de plus de 50 salariés :

  • exonération de cotisations sociales, à l'exception de la CSG et de la CRDS ;
  • exonération du forfait social dans les entreprises de moins de 250 salariés ;
  • fin de l'exonération de l'impôt sur le revenu depuis le 1er janvier 2024, sauf affectation à un plan d'épargne dans la limite des plafonds (3 000 et 6 000¤).

Pour les employés gagnant moins de 3 fois le SMIC et dans des entreprises de moins de 50 salariés :

  • exonération complète de cotisations sociales et du forfait social ;
  • l'exonération de l'impôt sur le revenu sera maintenue jusqu'au 31 décembre 2026.

Attention

Pour évaluer le plafond de 3 SMIC, est pris en compte le montant applicable pendant les 12 mois qui précèdent le versement de la prime, au prorata de la durée du travail du salarié.

À compter du 1er novembre 2024, le SMIC passe de 11,65¤ à 11,88¤ de l'heure (+2%) (augmentation automatique anticipée indexée sur l'inflation). Son montant mensuel brut est donc de 1 801,80¤ sur la base de la durée légale du travail de 35 heures hebdomadaires.

Ensuite, les modalités de décompte du seuil de 50 salariés ont été précisées par décret (décret n°2024-690, 5 juillet 2024). Celui-ci confirme la position prise antérieurement par l'administration dans le BOSS, à savoir que :

  • l'effectif est apprécié au niveau de l'entreprise (et non de l'établissement) en fonction de « la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l'année civile précédente » (articles L. 130-1, I, et R. 130-1 du code de la Sécurité sociale) ; 
  • les règles relatives à la neutralisation des effets d'un franchissement de seuil d'effectif ne sont pas applicables en l'occurrence.

Exemple

Une instruction du BOSS fournit un exemple de calcul avec différents taux de SMIC.

Si une PPV est versée le 28 janvier 2025, il convient de prendre en compte la valeur du SMIC applicable pour la période de janvier 2024 à décembre 2024, soit :

  • 1 766,92¤ pour la période courant du 1er janvier 2024 au 31 octobre 2024 ;
  • 1 801,80¤ pour la période courant du 1er novembre 2024 au 31 décembre 2024.

Dans le cas d'un salarié à temps plein travaillant 35 heures par semaine et dont les seules absences sont liées aux congés payés, la limite des 3 SMIC sur l'année est donc déterminée ainsi :

3 x ((10 x 1 766,92¤) + (2 x 1 801,80¤)) = 63 818,40¤.

A compter du 1er janvier 2027, la prime de partage de la valeur sera :

  • exonérée des cotisations sociales dans la limite de 3 000¤ ou 6 000¤ ;
  • assujettie à la CSG/CDRS ;
  • assujettie au forfait social dans les entreprises de 250 salariés et plus ;
  • assujettie à l'impôt sur le revenu sauf affectation à un plan d'épargne dans la limite des plafonds (3 000 et 6000¤).

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