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Prêt d'une filiale à sa maison mère, le gérant de la filiale est PDG?



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Posté dans le forum Forum Droit Fiscal, droit des sociétés, droit des affaires
Message écrit le: 28/06/2022 02:36
Adebayor

Cadre du secteur privé
Messages: 2
Inscrit le: 28/06/2022
Région: Cd - congo


Bonsoir,

Sommes nous dans une convention interdite lorsqu'une filiale B appartenant à 70% à une société holding ou Groupe A dont le PDG est l'actionnaire majoritaire à 80% de A;

B paye des frais (salaires, charges et avances de trésorerie) pour le compte des autres filiales (C, D, E F) de A en cours de développement et cela est converti en emprunt de B envers A pour un total annuel de 300.000 €;

Les sommes avancées par B, sont comptabilisées d'abord en compte courant associé puis en prêt en Immobilisations Financières sans intérêts puisqu'il n'ya pas de convention de prêt ni de calcul d'intérêts;

Le PDG de A est également Gérant de B dont il perçoit une rémunération de 15.000 € payée sur les comptes de B;

De plus la filiale B paye un montant trimestriel de frais d'assistance technique de 60.000 € à A;

L'associé minoritaire de B (30%) considère qu'il y a une convention interdite et ou abus de biens sociaux;

Le Commissaire aux comptes considère que tout est légal et se fonde sur l'article 223-21 du Code de commerce car l'emprunteur n'est pas une personne physique!

Qu'en pensez vous? en espérant avoir été clair.

Bien cordialement 



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Message écrit le: 28/06/2022 03:31
Papico

Chef de mission Audit en cabinet
Messages: 419
Inscrit le: 09/06/2013
Région: 78 - yvelines


 

Bonjour, 

votre cas me semble intéressant

En effet il est possible pour deux sociétés ayant des liens de participation de se faire des prêts mais attention ce genre d'opération doit être encadrée car en outre du risque fiscal il y'a également un risque que les opérations soient considérer comme un abus de bien social.

Il ne s'agit pas de conventions interdites mais néanmoins ces opérations devaient faire l'objet de conventions réglementées. D'ailleurs votre CAC devaient signaler ces opérations dans ses rapports spéciaux et ces opérations devaient être porter à la connaissance des actionnaires lors des assemblées approuvant les comptes.

Maintenant pour que l'on puisse parler d'abus de bien social il faudra que l'associé minoritaire prouve que les opérations n'ont pas été effectuées dans l'intérêt de la société et qu'il y'a pas eu de contrepartie.  

Cordialement 



Message écrit le: 28/06/2022 22:44
Jmb5

Expert-comptable à la retraite
Messages: 531
Inscrit le: 10/07/2016
Région: 38 - isère


Bonjour,

Sans remettre en cause l'avis de PAPICO, il me semble personnellement que votre opération présente deux points faibles importants : je comprends qu'aucune convention de trésorerie n'a été rédigée (et par conséquent que la procédure d'autorisation préalable par le conseil d'administration n'a probablement pas été respectée) et que les avances sont consenties sans contrepartie financière.

A mon avis, cette situation pourrait permettre de donner du sens à la position de votre associé minoritaire.

Le caractère licite de votre opération doit être analysé par rapport à la réglementation bancaire et au droit des sociétés.

Au regard de la réglementation bancaire :

La réception des dépôts de fonds et l'octroi de crédits sont des opérations de banque qui ne peuvent être réalisées que par des établissements de crédit (code monétaire et financier article L. 511-5).

Toutefois, cette interdiction ne fait pas obstacle à ce qu'une entreprise, quelle que soit sa nature, puisse procéder à des opérations de trésorerie avec des sociétés ayant avec elle, directement ou indirectement, des liens de capital conférant à l'une des entreprises un pouvoir de contrôle effectif sur les autres (code monétaire et financier article L. 511-7-3°). Lorsque cette condition est remplie, les sociétés peuvent recevoir et utiliser les fonds au profit de l'une ou plusieurs d'entre elles.

Pour que cette dérogation dite " au profit du groupe " joue, il faut tout d'abord un lien en capital, mais les textes ne fixent pas de pourcentage. Il faut aussi que ce lien confère à l'une des entreprises un pouvoir de contrôle effectif sur les autres.

Conformément à l'article L. 233-3 du Code de Commerce, il peut s'agir d'un contrôle à travers la majorité des droits de vote, d'un contrôle direct ou indirect, d'un contrôle de fait ou d'un contrôle en application d'un accord permettant de disposer de la majorité des droits de vote. De même, le contrôle effectif est reconnu au profit de la société mère non majoritaire, sous réserve qu'aucune autre société ne détienne une participation susceptible de faire obstacle à son pouvoir de contrôle.

Vos sociétés respectent ces conditions.

Au regard du droit des sociétés :

La prohibition de certaines opérations financières (emprunts, découverts en compte courant...) ne concerne que les personnes physiques (articles L. 225-43 et L. 225-91 du code de commerce). Les personnes morales peuvent en revanche, sous réserve de respecter le cas échéant la procédure des conventions réglementées, conclure les opérations financières visées, sauf preuve d'une interposition de personne entre la personne morale et ses administrateurs ou dirigeants.

Toutefois, selon la jurisprudence de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, pour que l'opération ne soit pas constitutive d'un abus de biens sociaux " la convention doit être dictée par un intérêt économique, social ou financier commun, apprécié au regard d'une politique élaborée pour l'ensemble du groupe ou, à tout le moins, en commun, et donner lieu à la conclusion d'engagements équilibrés, le cas échéant révisables et adaptables aux circonstances, et tenant compte à la fois de la réalité et de l'efficacité des prestations fournies, caractérisée par l'existence d'un support logistique et la qualité reconnue des prestations antérieurement rendues et, d'autre part, en ce qui concerne le prix fourni en retour, et des liens historiques et de solidarité unissant les sociétés, et des possibilités financières de celle qui en supporte la charge " (Bulletin CNCC n° 64, décembre 1986, page 391).

Le concours financier apporté par des dirigeants de droit ou de fait d'une société à une autre société d'un même groupe dans lequel ils sont intéressés directement ou indirectement doit ainsi :

  • être motivé par un intérêt économique, social ou financier commun, apprécié au regard d'une politique élaborée pour l'ensemble du groupe et,
  • ne doit ni être démuni de contrepartie ou rompre l'équilibre entre les engagements respectifs des diverses sociétés concernées,
  • ni excéder les possibilités financières de celle qui en supporte la charge.

En cas de non-respect de l'une de ces trois conditions le dirigeant pourra être poursuivi pour abus de biens sociaux.

Le Ministre de l'économie, des finances et du budget dans une réponse à M. PERICARD (journal Officiel 6 janvier 1986, AN question p. 60) a par ailleurs précisé que " rien ne s'oppose en principe à ce que des emprunts ou avances soient consentis entre sociétés d'un groupe quand bien même l'une exercerait les fonctions d'administrateur de l'autre à condition toutefois que soit respectée, le cas échéant, la procédure d'autorisation préalable du conseil d'administration et d'approbation par l'assemblée générale ", et sous réserve que ces conventions soient conformes aux motivations et à l'équilibre ci-dessus énoncés.

L'usage des biens ou du crédit de l'une des sociétés du groupe au mépris de l'intérêt de ce groupe est condamné et la préservation de l'intérêt du groupe est exigée pour mettre le dirigeant à l'abri d'une sanction pénale. L'intérêt de la mère et de la fille est recherché pour prouver le caractère normal de l'opération.

L'appréciation du caractère normal des conditions auxquelles le prêt est consenti doit s'apprécier à travers plusieurs critères :

- l'importance des montants en cause au regard de la situation financière de la société qui en supporte la charge,

- le taux appliqué en fonction de la nature de l'opération et de sa durée. Cette appréciation repose sur les conditions en vigueur tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du groupe. Elles doivent être égalitaires entre les filiales, sous réserve de la prise en compte des différences de situation et des conditions du marché à l'extérieur du groupe.

Au regard du seul droit des sociétés, si le prêt ou l'avance est consentie sans intérêt, la convention présente un caractère anormal, sauf à ce que la société qui consent cette avance puisse démontrer qu'elle a le plus grand intérêt à réaliser l'opération et qu'elle y trouve un avantage notable. C'est le cas par exemple lorsque le prêt gratuit est consenti à une filiale en difficulté afin d'éviter un dépôt de bilan. L'avantage peut aussi être lié à une opération devant être réalisée par la filiale dans l'intérêt du groupe, comme un achat de titres d'une autre société concurrente. De même, l'intérêt d'un prêt est incontestable lorsqu'il permet à une société d'aider financièrement une filiale qui, par son objet, est à même de lui apporter une clientèle importante.

Pour l'administration fiscale en revanche, les mouvements de fonds intragroupe doivent être normalement rémunérés. Les avances sans intérêt sont susceptibles d'être considérées pour la société prêteuse comme un acte anormal de gestion.

Je reste à votre disposition pour d'autres informations,  

Et vous souhaite une bonne continuation.

Bien à vous



Message écrit le: 29/06/2022 15:19
Adebayor

Cadre du secteur privé
Messages: 2
Inscrit le: 28/06/2022
Région: Cd - congo


bonjour 

Je vous remercie pour vos avis qui cernent parfaitement la problématique énoncée.
Toutefois il y a un aspect qui semble être mis en marge c'est celui de l'intérêt de l'associé minoritaire de B qui n'est pas du tout actionnaire dans le groupe A.
Ainsi les avances sont consenties aux filiales sœurs du groupe A dans l'intérêt du développement du groupe mais cela ne profite pas à l'actionnaire minoritaire de B sauf à se voir éventuellement offrir une contrepartie en action dans le groupe A ce qui ne semble pas acquis.
Merci pour le complément éventuel de votre avis.
Bien cordialement et merci encore.



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Message écrit le: 29/06/2022 15:51
Jmb5

Expert-comptable à la retraite
Messages: 531
Inscrit le: 10/07/2016
Région: 38 - isère


Bonjour,

Merci pour votre retour.

A mon avis, il n'y a pas lieu de modifier la répartition du capital de A en y faisant participer l'actionnaire minoritaire de B. En revanche, pour sauvegarder les intérêts de B, il convient de rémunérer ses avances à A, au moins à taux identique à celui utilisé pour les avances (éventuelles) entre A, C, D, E et F.

Je reste à votre disposition pour d'autres informations,  

Et vous souhaite une bonne continuation.

Bien à vous



Message écrit le: 29/06/2022 18:45
Papico

Chef de mission Audit en cabinet
Messages: 419
Inscrit le: 09/06/2013
Région: 78 - yvelines


Bonjour,

Comme l'a souligné JMB il convient d'exiger une rémunération sur les avances consenties pour sauvegarder les intérêts de B.  Ce qui d'un point de vue juridique est légal et normal

Cordialement



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