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Imposition indemnité d'éviction



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Posté dans le forum Forum Droit Fiscal, droit des sociétés, droit des affaires
Message écrit le: 21/02/2023 09:45

Expert-comptable à la retraite
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Inscrit le: 10/07/2016
Région: 38 - isère


Bonjour,

Je vous remercie pour vos précisions.

L'exposé de motif du versement de votre indemnité me laisse personnellement plutôt pencher pour l'imposition en tant que recette imposable normale et non en tant que plus-value. Le droit au bail n'a pas été acquis à l'origine et n'est pas mentionné sur votre registre des immobilisations.

Le BOI-BNC-CHAMP-10-10-20-30 du 2-3-2016 reproduit ci-dessous fait par ailleurs référence à deux décisions " similaires " à la vôtre du Conseil d'Etat en la matière :

  • l'arrêt n° 94533 du 07/07/1976 concerne un contribuable qui exerçait sa profession en tant que locataire d'un local dont il a été évincé par le propriétaire. A la suite d'un accord avec ce dernier, il perçoit une indemnité destinée à réparer le préjudice subi dans l'exercice de son activité professionnelle du fait de la nécessité de s'installer à un autre endroit. Le Conseil d'Etat estime que cette indemnité doit être regardée comme une recette professionnelle imposable et non comme la compensation d'une perte de capital. La convention conclue avec le propriétaire ne comporte à la charge du contribuable aucune obligation touchant à l'exercice de sa profession ou à sa clientèle. Elle lui impose seulement celle de quitter les lieux ce qui ne l'empêche pas de poursuivre l'exercice de sa profession avec la même clientèle en s'installant dans un autre local,
  • selon l'arrêt n°51458 du 03/12/1986, l'indemnité dont la seule contrepartie est l'obligation de quitter les lieux en vue de permettre la démolition de l'immeuble, le contribuable restant libre de conserver la même clientèle en se réinstallant dans un autre immeuble, ne peut être considérée comme une indemnité reçue en contrepartie de la cessation de l'exercice de la profession ou du transfert d'une clientèle.

Dans une autre décision de la Cour Administrative de NANTES n° 95-245 du 26/05/1998, l'indemnité perçue par un contribuable destinée à compenser les préjudices subis en raison de la non-application de la clause du bail professionnel lui accordant un droit de préférence lors de la vente des locaux dans lesquels il exerçait sa profession depuis six ans a été considérée par la Cour comme ayant eu pour objet de compenser les frais et charges causés par le transfert du cabinet dans un autre local et les pertes de recettes correspondantes. Dans cette affaire, le contribuable n'avait aucun droit au renouvellement de son bail. Cette indemnité constitue une recette professionnelle imposable ayant pour seule contrepartie la réparation des préjudices matériels étroitement liés à la profession, et non un préjudice moral. Cependant dans cette décision, le tribunal a admis le caractère non imposable de la moitié de l'indemnité.

Il est possible que votre avocat se réfère à cette décision pour indiquer qu'une partie seulement de l'indemnité est imposable, étant sous-entendu qu'une partie serait traitée comme une recette normalement imposable et l'autre en tant que plus-value. Ceci étant, hors le cas d'un litige avec l'administration fiscale soumis à l'arbitrage d'un juge, il me semble pas que le contribuable puisse procéder à une telle ventilation de son propre chef dans sa déclaration de résultat. Au pire, vous pourrez faire état de cette jurisprudence en cas de contestation de votre position par l'administration et l'introduction d'une instance devant le juge.

Dans votre cas, il convient à mon avis :

  • de prendre de nouveau contact avec l'avocat qui est à l'origine de cette information pour qu'il en précise les contours, ou d'un autre avocat spécialisé en droit fiscal,
  • " d'obliger " le SIE à apporter une réponse à votre question en rédigeant officiellement un rescrit, en prenant soin de décrire fidèlement les conditions de l'accord d'indemnisation, voire d'en joindre la copie à votre demande,
  • d'interroger sur cette question votre Association de Gestion Agréée pour les professions libérales, si vous êtes adhérent,
  • de " passer en force " en considérant que votre indemnisation constitue une plus-value et en prévoyant la rédaction dans votre déclaration d'une "?€?mention expresse?€?". Cette garantie légale est prévue par l'article 1727, II, 2° du CGI. Elle permet à un contribuable de ne pas supporter d'intérêts de retard en cas de rectification ultérieure par l'administration. Elle consiste à "?€?mentionner?€?" par une indication expresse portée sur la déclaration ou dans une note annexée, les motifs de droit ou de fait qui le conduisent à ne pas reporter des éléments d'imposition, en totalité ou en partie, ou à leur donner une qualification qui entraînerait, si elle était fondée, une taxation atténuée. Seuls les contribuables qui ont régulièrement déposé les déclarations auxquelles ils étaient tenus peuvent être admis au bénéfice de la mention expresse. Cette solution va inévitablement attirer l'attention de l'administration qui risque de vérifier les circonstances qui vous conduisent à y avoir recours.

Je reste à votre disposition pour d'autres informations,

Et vous souhaite une bonne continuation.

Bien à vous

EXTRAIT DU BOI :

II. Indemnité d'éviction

50

L'indemnité d'éviction, perçue par un contribuable exerçant une profession non commerciale, à raison du local professionnel dont il disposait, entre dans le champ d'application des bénéfices non commerciaux et, constituant pour l'intéressé une recette professionnelle, doit, en tant que telle, être retenue pour la détermination de son bénéfice imposable.

60

Il a été jugé que, dans le cas où un contribuable qui, exerçant une activité libérale, a consenti, par convention, à être évincé des bureaux dans lesquels il avait son cabinet et, en contrepartie, a reçu une indemnité destinée à réparer le préjudice résultant du fait qu'il devait s'installer ailleurs, cette indemnité ne peut être regardée : 

- ni comme la compensation d'une perte en capital ;

- ni comme une indemnité " reçue en contrepartie de la cessation de l'exercice de la profession ou du transfert d'une clientèle ", dès lors que l'intéressé avait seulement l'obligation de quitter les lieux et pouvait poursuivre ailleurs l'exercice de sa profession avec la même clientèle.

Elle constitue, dès lors, une recette professionnelle, dont il doit être tenu compte pour la détermination des bénéfices non commerciaux du contribuable (CE, arrêt du 7 juillet 1976 n° 94533 et  CE, arrêt du 3 décembre 1986 n° 51458).



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