Le contrat de vente : définition, qualification, et conditions de validité

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L'article 1582 du Code civil définit le contrat de vente comme la convention par laquelle l'un s'oblige à livrer une chose et l'autre à payer ladite chose. La vente peut être faite par acte authentique ou sous seing privé.

Qualification du contrat de vente

Pour être qualifié de contrat de vente, un contrat doit réunir deux éléments essentiels :

  • la transmission de la propriété de l'objet du contrat, ce qui permet de distinguer le contrat de vente par rapport au contrat de bail qui implique uniquement une mise à disposition. D'ailleurs, cette transmission se réalise dès l'échange des consentements, sans la nécessité d'un écrit, même si la pratique implique la plupart du temps un écrit ;
  • la transmission à titre onéreux de l'objet du contrat, ce qui permet notamment de le distinguer des contrats à titre gratuit, tel que le contrat de donation. En outre, le caractère onéreux se caractérise par une contrepartie monétaire, ce qui permet de le distinguer d'autres contrats comme l'apport en société ou le contrat d'échange. 

Conditions de validité du contrat de vente

Le contrat de vente doit respecter les conditions de validité de tout contrat, à savoir le consentement des parties, la capacité des parties et un contenu licite et certain. 

Il est évident que tout contrat doit respecter les conditions essentielles de droit commun de validité, mais le contrat de vente prévoit quelques spécificités qu'il faut désormais préciser. Pour plus de précisions sur la formation du contrat, lire l'article « la formation du contrat ».

Capacité et pouvoir des parties

L'article 1594 du Code civil précise que toute personne peut acheter ou vendre, sauf exception légale. Dans ce cadre, l'article 1596 interdit aux personnes chargées d'administrer les biens d'autrui d'acheter ces mêmes biens, à savoir les tuteurs, mandataires, fiduciaires, administrateurs et officiers publics.

De plus, l'article 1597 interdit aux magistrats, greffiers, avocats, notaires, huissiers de devenir des cessionnaires (acheteur) des droits litigieux qui sont de la compétence du tribunal dans le ressort duquel ils exercent leur fonction.

Les différents droit privé prévoient aussi des limites dans la conclusion d'un contrat de vente, par exemple le dirigeant qui a été déssaisi de des pouvoirs au profit d'un liquidateur judiciaire.

Il faut aussi prendre en compte les clauses contractuelles éventuellement prévues, telles que le droit de préemption avant d'envisager un contrat de vente ou encore les pactes de préférences.

Consentement des parties

D'une part, le consentement des parties est libre par principe, même si des exceptions s'appliquent au contrat de vente.

Dans le cadre du droit de la consommation, il est interdit au professionnel de refuser la vente à un consommateur sauf motif légitime. Pareillement, le refus de vente entre professionnels peut impliquer un abus de droit et par extension engager la responsabilité du professionnel litigieux.

De plus, le droit des procédures civiles d'exécution prévoit des interdictions suite à la saisie des biens, puisque le bien saisi implique l'indisponibilité du bien et donc sa vente.

Par ailleurs, les contrats de vente prévoient parfois des délais de réflexion dans lesquels le destinataire de l'offre ne peut manifester son acceptation ou encore des délais de rétractation dans lequel le bénéficiaire d'une offre peut rétracter son acceptation.

D'autre part, le consentement doit être éclairé. Cela implique notamment que le vendeur est soumis à une obligation d'information, c'est-à-dire qu'il doit fournir à l'acheteur toutes les informations essentielles du contrat prévu et il doit également respecter l'obligation de garantie contre les vices cachés (article 1625 du Code civil).

La vente peut être précédée d'une promesse unilatérale de vente, qui est un contrat dans lequel tous les éléments essentiels du contrat final sont réunis (en l'occurrence la vente), il ne reste plus qu'au bénéficiaire de lever l'option. Le promettant ne peut plus révoquer sa promesse pendant le délai d'option et sa renonciation n'empêchera pas la formation du contrat, aux termes de l'article 1124 du Code civil. Le contrat avec un tiers en violation d'une promesse unilatérale est nul.

La vente peut aussi se matérialiser par une promesse synallagmatique de vente, à savoir d'un côté la promesse d'une vente et de l'autre la promesse d'un achat. L'article 1589 prévoit d'ailleurs que la promesse vaut vente en cas de consentement réciproque sur la chose et le prix.

Contenu licite et certain du contrat de vente

Le contrat de vente peut porter sur une grande variété de biens, qu'ils soient corporels ou non. La chose vendue doit être aliénable, c'est-à-dire qu'elle est dans le commerce et licite. Certaines choses sont exclues comme les éléments du corps humain, des contrefaçons, des choses dangereuses. La chose vendue doit être existante, même si la vente d'une chose future est envisageable. 

La chose doit aussi être déterminée ou déterminable à peine de nullité, ce qui implique que le contrat de vente doit prévoir le prix au moment de la conclusion du contrat ou du moins des éléments qui permettent de fixer le prix ultérieurement sans pour autant sans nouvelle intervention des parties. Dans l'hypothèse des contrats-cadres, le prix est fixé ultérieurement et unilatéralement par l'une des parties sous réserve de rives de contestations.

Le prix doit être réel, sérieux et juste. Par principe, l'équivalence des prestations n'est pas une cause de nullité, sauf quelques exceptions, notamment la lésion de la vente d'un immeuble pour plus de 7/12 du prix selon les dispositions de l'article 1674 du Code civil.

Effets du contrat 

Le principal effet du contrat de vente est l'effet translatif de propriété entre le vendeur et l'acheteur. De ce transfert, découle des obligations d'une part à l'égard du vendeur et d'autre part à l'égard de l'acheteur.

Obligations de l'acheteur 

L'acheteur a une obligation de paiement du prix conformément au contrat conclu, à savoir son obligation contractuelle, sans quoi le vendeur pourra se prévaloir des sanctions de l'inexécution de droit commun (notamment l'exécution forcée).

Autre obligation découlant de l'achat, à savoir de retirer la chose. Ainsi, soit il est prévu la réception de la chose acquise lorsque la livraison incombe au vendeur soit  en retirant la chose chez le vendeur.

Obligations du vendeur

En vertu de l'article 1603 du Code civil, il incombe au vendeur : 

  • une obligation de livraison conforme ;
  • et une obligation de garantie de la chose vendue.

L'obligation de délivrance conforme implique le transfert de la chose, ainsi que ses accessoires. Ce transfert doit intervenir dans le délai conformément convenu, sous peine de résolution du contrat, en vertu de l'article 1610 du Code civil.

L'obligation de garantie renvoi d'une part à la garantie d'éviction, c'est-à-dire qu'il garantit à l'acheteur une possession paisible de la chose et le plein exercice du droit de propriété. La garantie d'éviction concerne tout autant le fait personnel du vendeur (le vendeur revendique un droit ou adopte un comportement portant atteinte au droit de propriété de la chose vendue) mais aussi le fait d'autrui (un tiers revendique un droit sur la chose).

L'obligation de garantie renvoi d'autre part aux vices cachés. Le vendeur ne doit pas dissimuler les défauts de la chose vendue qui rendraient l'usage de la chose impropre ou qui diminueraient tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou du moins à un prix inférieur.

L'action en garantie des vices cachés s'exerce dans le délai de 2 ans à partir duquel le vice a été découvert. Le délai d'action entre commerçants est différent et fait l'objet d'une divergence de la part de la jurisprudence. En effet, certains juges ont considéré que le délai de prescription de l'action en garantie doit être exercé dans un délai de 5 ans à compter de la conclusion du contrat (Cour de cassation, 6 juin 2018, n°17-17.438). D'autres juges ont considéré que ce délai était le délai butoir de 20 ans prévu par l'article 2232 du Code civil à compter de la formation du contrat, c'est-à-dire à la naissance du droit (Cour de cassation, 8 décembre 2021, n°20-21.439).

Si l'acheteur arrive à prouver le vice caché, il peut obtenir la résolution ou l'action estimatoire dans le but de faire réduire le prix (article 1644). Si le vendeur était de mauvaise foi et connaissait le vice caché, il encourt l'engagement de sa responsabilité et le paiement de dommages et intérêts (article 1645). Lorsque le vendeur est un professionnel, il y a une présomption de connaissance du vice caché.

Enfin, dans le cadre d'une chaîne translative de propriété, le sous-acquéreur dispose d'une action directe à l'encontre du vendeur originel. Ce dernier peut opposer toutes les exceptions personnelles qu'il détenait sur le premier acheteur à l'encontre du sous-acquéreur.