La déclaration des bénéficiaires effectifs (BE) est une obligation légale essentielle pour assurer la transparence et la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.
En 2024, plusieurs modifications législatives et réglementaires ont été introduites pour renforcer et clarifier cette obligation.
Cet article revient sur les entités concernées, les modalités de déclaration et les sanctions en cas de non-respect, ainsi que les récentes évolutions concernant l'accès public au registre des bénéficiaires effectifs.
Qu'est-ce qu'un bénéficiaire effectif ?
Un bénéficiaire effectif (BE) est une personne physique qui contrôle directement ou indirectement une société ou une organisation. Pour être considéré comme bénéficiaire effectif, un individu doit remplir l'une des conditions suivantes :
- détenir plus de 25% des droits de vote ou du capital de la société ;
- exercer un pouvoir de contrôle sur la société par d'autres moyens, tels que la nomination ou la révocation des membres de la direction.
Si aucun individu ne répond à ces critères, les bénéficiaires effectifs sont les représentants légaux de la société.
Infogreffe propose un schéma pour aider à identifier les bénéficiaires effectifs.
Entités concernées par la déclaration des bénéficiaires effectifs
La déclaration des BE concerne principalement les entités suivantes :
- les sociétés et groupements d'intérêt économique ayant leur siège en France ;
- les sociétés commerciales étrangères ayant un établissement en France ;
- les entités soumises à l'obligation d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS) ou au registre national des entreprises (RNE), y compris les organismes de placement collectif, associations et fonds de dotation.
Depuis l'entrée en vigueur de la loi DDADUE du 10 avril 2024, toutes les associations, même celles non tenues de s'immatriculer au RCS, doivent également déclarer leurs BE.
Le décret n°2024-720 du 5 juillet 2024 a également introduit des mesures de simplification et de dématérialisation des procédures pour les organismes philanthropiques.
Désormais, ces organismes doivent utiliser des téléservices pour les déclarations, autorisations et transmissions de documents.
Le décret harmonise également les obligations de transmission de documents tels que les comptes annuels et les rapports d'activité, et instaure un registre national des associations. Enfin, il réduit les délais d'instruction pour les demandes de libéralités et remplace certaines approbations par des déclarations auprès du ministre de l'Intérieur.
Ces ajustements visent à faciliter la conformité tout en renforçant les contrôles.
Registre des bénéficiaires effectifs : un accès désormais restreint aux seuls tiers justifiant d'un intérêt légitime
Le registre des bénéficiaires effectifs, accessible au public depuis 2021, a vu son accès public supprimé à compter du 31 juillet 2024, à la suite d'une décision de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 22 novembre 2022 (CJUE, communiqué de presse). Il a été jugé que l'accès public constituait une ingérence grave dans la vie privée, au regard de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
Toutefois, une directive européenne du 31 mai 2024 (Directive (UE) 2024/1640) prévoyait de rétablir cet accès public sous certaines conditions.
La loi n°2025-391 du 30 avril 2025, dite DDADUE 2025, introduit à son article 4 un nouvel article L. 561-46-1 dans le Code monétaire et financier, restreignant l'accès au registre des bénéficiaires effectifs. Désormais, seules les personnes pouvant démontrer un intérêt légitime pourront consulter le registre des bénéficiaires effectifs et les informations enregistrées, à l'exception des autorités compétentes, dont l'accès reste intégral.
Cette réforme s'inscrit dans le prolongement de la jurisprudence européenne récente, qui remet en cause l'accès public généralisé à ces données, au nom du respect de la vie privée et de la protection des données personnelles. Elle implique également une actualisation de la liste des autorités habilitées à accéder sans restriction à l'ensemble des données du registre.
Les modalités pratiques d'application, notamment la définition de la notion d'« intérêt légitime » et les mécanismes de contrôle de cet accès, devront être précisées par décret.
Sanctions en cas de non-respect des obligations de déclaration
Le non-respect des obligations de déclaration des BE peut entraîner des sanctions sévères.
Pour les personnes physiques responsables, cela inclut une amende de 7 500¤ et jusqu'à 6 mois de prison, ainsi qu'une interdiction de gérer pouvant aller jusqu'à 15 ans.
Les bénéficiaires effectifs eux-mêmes peuvent être sanctionnés pour non-communication des informations nécessaires.
Pour les personnes morales, les sanctions peuvent aller jusqu'à 37 500¤ d'amende, la dissolution de la société, le placement sous surveillance judiciaire, la fermeture d'établissements, l'exclusion des marchés publics et d'autres restrictions opérationnelles.
Depuis le 15 juin 2025 et l'entrée en vigueur de la loi n°2025-532 du 13 juin 2025, visant à sortir la France du piège du narcotrafic, les sociétés qui ne procèdent pas à la déclaration ou à la mise à jour de leurs bénéficiaires effectifs s'exposent à une radiation d'office du registre du commerce et des sociétés (RCS).
Prévue par les textes mais jusqu'ici rarement appliquée, cette sanction est désormais activée par les greffiers des tribunaux de commerce, 3 mois après l'envoi d'une mise en demeure restée sans effet. L'objectif est de renforcer la transparence et fiabiliser les données du Registre des bénéficiaires effectifs (RBE).
Pour mémoire, la déclaration doit être effectuée à l'immatriculation de la société ou dans les 30 jours suivant toute modification concernant les bénéficiaires effectifs.
Maxime Navarrete
Responsable de l'actualité professionnelle de Compta Online, média communautaire 100% digital destiné aux professions du Chiffre depuis 2003.
Après 8 ans en tant qu'éditeur juridique puis rédacteur en chef de Lexis 360 experts-comptables chez LexisNexis, je rejoins l'équipe Compta Online en octobre 2021.
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