Les cessions d'actions dans les SA et les SAS

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Modifié le 22/01/2025
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Les actions sont en principe des titres librement négociables sauf exception en ce qui concerne les actions attribuées aux salariés par exemple. Des dispositions spécifiques existent pour les titres cotés sur un marché réglementé.

Céder ses actions est un droit pour tout actionnaire, qu'il soit majoritaire ou minoritaire. Seules une inaliénabilité temporaire et des restrictions à l'aide des clauses d'agrément et de préemption peuvent limiter temporairement ou aménager ce droit.

Un écrit est alors fortement recommandé, y compris lorsque l'opération est assortie de conditions particulières comme des conditions suspensives ou résolutoires, un paiement fractionné ou des garanties par exemple.

Focus DSCG

C'est dans le cadre de l'UE1 du DSCG que les questions relatives aux cessions de titres de participation, cessions d'actions ou aux cessions de parts sociales sont relativement récurrentes. Entre 2017 et 2020, elles ont pu concerner le régime fiscal de la plus-value, l'agrément des associés, etc.

Pour l'expert-comptable, les cessions d'actions sont une activité à risques qui peut engager sa responsabilité en tant que rédacteur de l'acte, par exemple dans le cadre de son devoir de conseil.

Qu'est-ce qu'une cession d'actions ?

La cession d'actions s'inscrit dans le cadre des contrats civils ou commerciaux suivant la nature du contrôle qu'elle confère aux acquéreurs. Elle consiste à céder des titres de sociétés détenus par une personne physique ou morale à destination d'une autre personne physique ou morale. On parle de transmission à titre onéreux.

Le contrat de cession de titres doit présenter les caractéristiques suivantes :

  • consentement non vicié (par le dol ou l'erreur) ;
  • un prix déterminé ou déterminable ;
  • une garantie des vices cachés.

Comment procéder à une cession d'actions ?

La cession d'actions de sociétés non cotées (sociétés anonymes ou sociétés par actions simplifiées) est en principe un acte civil sauf si l'acquéreur prend le contrôle de la société (l'acte prend alors un caractère commercial).

Même si aucun formalisme n'est prévu, le recours à un acte de cession est fortement recommandé. La promesse de cession tout comme l'acte de cession restent néanmoins facultatifs.

Parmi les actes préparatoires à la cession on peut citer :

  • la promesse unilatérale de cession (encadrée par l'Article 1124 du Code Civil) permet toutefois de fixer les principales caractéristiques de la cession telles que le nombre d'actions à céder et le prix de la cession ;
  • la promesse croisée : l'un s'engage à vendre tandis que l'autre partie s'engage à acheter ;
  • le pacte de préférence : aussi appelée clause de préemption. Il permet de donner préférence, lors de la cession, à un tiers désigné.

Ce n'est qu'en présence d'une clause d'agrément ou d'une clause de préemption, qu'une étape supplémentaire, la demande d'agrément ou l'information des associés sera nécessaire.

La modification des statuts sera parfois nécessaire, notamment lorsque les actions sont nominatives ou que les statuts fixent la répartition du capital social entre les actionnaires.

Une déclaration aux services des impôts des entreprises se fait dans le mois qui suit la cession.

Attention, même si la modification des statuts n'est pas nécessaire, il est obligatoire d'inscrire la cession dans le registre des mouvements qui répertorie tous les transferts de titres intervenus.

La Cour de cassation a récemment rappelé que le transfert de propriété des actions n'intervient qu'au moment où celles-ci sont inscrites sur le compte individuel de l'acheteur ou sur le registre des titres nominatifs de la société.

Dans cette affaire, un associé d'une SAS avait cédé des actions à un couple. Le cédant contestait leur qualité d'associés, arguant que le prix n'avait pas été payé et qu'aucun ordre de mouvement n'avait été effectué. La cour d'appel avait jugé la vente valide, malgré l'absence de paiement.

Cependant, la Cour de cassation a annulé cette décision, soulignant que sans inscription officielle des actions, l'acheteur ne peut être reconnu comme associé. Les acquéreurs doivent donc veiller à ce que la société procède à l'inscription effective de leurs actions pour sécuriser leur statut d'actionnaire (Cour de cassation, 18 septembre 2024, n°23-10455).

Clauses restreignant la cession

On distingue 3 clauses permettant de limiter le droit, pour un actionnaire, de céder ses actions. Elles doivent être vérifiées avant tout projet de cession.

La clause d'inaliénabilité

La clause d'inaliénabilité, également appelée clause d'incessibilité, permet par exemple d'interdire toute cession pendant une durée limitée. Elle peut figurer dans un acte de cession, dans les statuts ou dans un pacte d'actionnaires par exemple. Cette clause est applicable uniquement dans les SAS.

Pour être valable, la clause d'inaliénabilité doit avoir une limitation dans le temps. Elle est fixée à 10 ans maximum (article L227-13 du Code de commerce).

La clause d'agrément

La clause d'agrément figure obligatoirement dans les statuts de la société anonyme ou de la SAS (dès la constitution ou après modification des statuts par les assemblées générales). Elle peut également être insérée dans un pacte d'actionnaires.

Cette clause prévoit que les actionnaires actuels de l'entreprise donnent leur accord lors d'une cession d'actions. Cela permet ainsi de contrôler l'entrée de nouveaux actionnaires.

Un actionnaire souhaitant céder ses actions devra effectuer une demande d'agrément adressée à l'assemblée des actionnaires qui aura un délai de 3 mois pour apporter une réponse et la notifier par écrit à l'actionnaire cédant.

La clause de préemption

Insérée dans les statuts ou dans un pacte d'actionnaire, la clause de préemption permet aux actionnaires déjà présents d'acquérir les actions mises en vente (qui leur sont proposées en priorité). L'actionnaire souhaitant céder ses actions doit informer les actionnaires bénéficiant de la préemption de son projet de cession. Ces derniers peuvent exercer leur droit ou y renoncer. La réponse doit être formulée dans le délai indiqué dans la clause de préemption, ce délai doit être raisonnable (généralement 3 mois).

Les cessions d'actions et la fiscalité



Les droits d'enregistrement

Les cessions d'actions sont soumises aux droits d'enregistrement au taux de 0,1% en vertu de l'article 726 du CGI. Pour les sociétés à prépondérance immobilière, le taux est porté à 5%.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 18 décembre 2024, n°23-21.435, a jugé que la nature des titres cédés après transformation, s'apprécie à la date du transfert de propriété. En l'espèce, il s'agissait d'un cas de cession de titres après la transformation d'une SARL en SAS. Pour rappel, les droits d'enregistrements relatifs à la cession des parts d'une SARL est de 3% (après l'application d'un abattement de 23 000¤) contre 0,1% pour la cession des actions d'une SAS selon les dispositions de l'article 726 du CGI.

En ce qui concerne les cessions aux salariés ou aux membres de la famille, il existe un abattement de 500 000¤.

Les plus-values de cession

Il convient de distinguer si l'entreprise cédante est soumise à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés, ou encore s'il s'agit d'une personne physique associée d'une société de personnes dans laquelle elle exerce son activité professionnelle ou n'est qu'un simple apporteur de fonds (auquel cas c'est le régime des plus-values des particuliers qui s'applique).

Pour les entreprises relevant de l'impôt sur le revenu, la qualification de la plus-value professionnelle s'effectuera en fonction de la nature des titres cédés et de leur durée de détention. Les plus-values à long terme sont soumises au taux d'impôt sur le revenu forfaitaire de 12,8% ainsi qu'aux prélèvements sociaux de 17,2%.

Il existe des régimes d'exonération des plus-values qui sont :

  • exonération en faveur des très petites entreprises (article 151 septies du CGI) ;
  • exonération des PME en fonction de la valeur du fonds de commerce (article 238 quindecies du CGI) ;
  • exonération en cas de départ en retraite du dirigeant (article 151 septies A du CGI).

Pour les entreprises relevant de l'impôt sur les sociétés, le régime fiscal dépend de la qualification des titres cédés (titres de placement ou titres de participation).

Les titres de placement sont intégrés dans le résultat de l'entreprise alors que les titres de participation doivent faire l'objet d'une qualification (court ou long terme). Une plus-value long terme fera l'objet d'une déduction à 100% et une quote-part pour frais et charges de 12% sera réintégrée au résultat fiscal.

Le dispositif prévoyant un abattement fixe de 500 000¤ pour les dirigeants partant à la retraite a pris fin le 31 décembre 2024. Bien que le dispositif devait être prolongé par le PLF jusqu'en 2031, la censure du Gouvernement Barnier a eu pour conséquence la caducité de ce dispositif (qui devrait être toutefois repris dans le prochain budget).

En raison de la censure du Gouvernement Barnier, impliquant le rejet du PLFSS 2025, tous les travaux parlementaires ont été suspendus. Ainsi, le PLF 2025 est notamment remis en cause. Par conséquent, toutes les mesures votées (notamment celles ci-dessous) pendant ce processus sont caduques.

Le 16 octobre 2024, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, la commission des Finances de l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à augmenter le taux global de la flat tax (ou PFU) de 30% à 33% sur les revenus du capital perçus à partir de 2025.

Cet amendement proposait de porter la part de l'impôt sur le revenu de 12,8% à 15,8%, qui, ajoutée aux 17,2% de prélèvements sociaux, porterait le taux total à 33%. Cette mesure devait générer environ 800 millions d'¤ de recettes fiscales supplémentaires par an.

Le 19 octobre, la Commission des finances a finalement rejeté cette proposition d'augmentation de la flat tax.

Un autre amendement prévoit une majoration temporaire de 5 points de la flat tax, la portant à 35% pour les « super-distributions » de dividendes et les rachats d'actions par les grandes entreprises, lorsque ces distributions dépassent de 20% la moyenne entre 2017 et 2021. Cette proposition est toujours en cours de discussion.