Comptabiliser le carry back (déficit reportable en arrière)

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Modifié le 09/01/2025
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Le report en arrière des déficits consiste à imputer, sur la déclaration des résultats, un déficit fiscal sur le bénéfice de l'exercice précédent. L'entreprise génère ainsi une créance fiscale d'impôt sur les sociétés (IS) au moment de l'exercice déficitaire, qu'elle peut ensuite utiliser pour régler ses futures échéances d'IS au cours des 5 années suivantes celle de la clôture de l'exercice au titre duquel l'option pour le report en arrière a été exercé.

Elle a également la possibilité d'obtenir le remboursement de cette créance au bout d'une durée de 5 ans si elle le souhaite. Ce dispositif ne s'applique donc qu'aux entreprises soumises à l'IS.

Dans un arrêt de la Cour d'Appel de Toulouse en date du 14 novembre 2024, n°23TL00012, le juge s'est prononcé sur la condition d'identité d'une entreprise lors de l'option pour le report en arrière du déficit.

Il s'agissait de savoir si une entreprise pouvait bénéficier du report en arrière du déficit (article 220 quinquies), sur un exercice au cours duquel est intervenu un changement d'activité (qui emporte cessation d'entreprise selon les dispositions de l'article 221,5 du CGI). Il résulte des dispositions combinées des articles que l'exercice par une société du report en arrière du déficit est notamment conditionnée par le fait qu'elle n'est pas subi dans son activité réelle, de transformation, telles qu'elles ne seraient plus la même (la question était inédite puisque le changement d'activité n'est pas cité comme une condition dans l'article 220 quinquies).

Le report en arrière des déficits n'est possible que sur le dernier exercice clos et ne porte que sur le seul bénéfice de l'exercice précédent. Il est plafonné à 1 million d'¤ et doit être demandé au plus tard au moment du dépôt de la liasse fiscale qui fait apparaître ce déficit. Le déficit ne s'impute pas sur les bénéfices distribués.

La créance de carry back n'a pas d'incidence sur le calcul de la participation des salariés aux résultats.

L'imputation de la créance de report en arrière des déficits

L'imputation de la créance de report en arrière se fait uniquement sur l'impôt sur les sociétés et les acomptes correspondants. Par ailleurs, l'imputation en arrière des déficits est possible sur un bénéfice rectifié par l'administration (Cour administrative d'appel de Bordeaux, 28 janvier 2003, n°00-2223) ou encore sur un bénéfice non déclaré pour lequel les impositions mises en recouvrement à la suite d'un contrôle n'ont pas été acquittées (Tribunal administratif de Lille, 2 février 2018, n°1508675). Inversement, sont exclus du bénéfice de la créance de carry back, les bénéfices exonérés ayant donné lieu au paiement de l'impôt par imputation de crédit, de réduction d'impôt ou d'excédent de CIR.

L'imputation de la créance de carry back sur les dettes fiscales issues d'un autre impôt tel que la TVA, la taxe sur les salaires, n'est pas possible sauf si la créance de carry back est devenue remboursable. L'imputation remplacera alors le remboursement.

Dans le cas de l'utilisation de la créance de carry back pour le paiement d'un acompte d'IS, il convient de comptabiliser le montant imputé :

  • au débit du compte 444 État-Impôts sur les bénéfices (ou de sa subdivision 4441 État-Acomptes IS) ;
  • au crédit du compte 4442 État-Créances de carry-back.

Dans le cas de l'utilisation de la créance pour le paiement du solde d'IS :

  • au débit du compte 695 Impôt sur les bénéfices ;
  • au crédit du compte 4441 Etat-Impôts sur les bénéfices. 

Le remboursement de la créance de report en arrière des déficits

Le remboursement de la créance se fait au bout de 5 ans sauf si la société concernée fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, de sauvegarde financière accélérée, de redressement ou de liquidation judiciaire. Dans ce cas, elle pourra bénéficier d'un remboursement anticipé à compter de la date du jugement. Depuis le 1er janvier 2021, cette procédure est également applicable en cas de procédure de conciliation (article 220 quinquies I du CGI).

La mobilisation de la créance de carry back

Sans attendre le délai de 5 ans et son remboursement, les entreprises peuvent également céder leur créance de carry back à un établissement bancaire, la remettre à l'escompte ou l'utiliser pour le paiement de l'impôt sur les sociétés des exercices suivants.

Si la créance est cédée en garantie à un établissement bancaire, elle ne peut plus être imputée sur l'IS dû au titre d'un exercice clos à compter de cette date. Le traitement comptable suit alors celui des « loi Dailly ».

Si la créance est remise à l'escompte, le traitement comptable suit celui des effets remis à l'escompte.

Dans ces cas, elle est en principe inaliénable et incessible par principe sauf en cas de fusion ou en cas d'entrée dans un groupe fiscal intégré. La créance résultant du report en arrière d'un déficit avant l'intégration peut être conservée par la société qui a subi le déficit, ou être transmise à la société tête de groupe. Ainsi, la société mère peut elle aussi la mobiliser, soit à titre de garantie, soit au paiement de l'IS (dans la limite de ce qu'aurait versé la filiale) ou encore de bénéficier du remboursement au bout du délai de 5 ans le cas échéant.

La comptabilisation du carry back (créance de report en arrière des déficits)

Le produit né du report en arrière des déficits est comptabilisé dans un compte 699 Produits - Report en arrière des déficits. Ce produit n'est pas imposable et sera déduit extra-comptablement.

La création d'une subdivision du compte 444 (compte 4442 État - Créances de carry back) pour la créance permettra d'en suivre l'imputation et le remboursement.

Exemple de report en arrière d'un déficit

Une société soumise à l'impôt sur les sociétés réalise en N un déficit de 3 millions d'¤. Elle est soumise au taux plein d'IS, soit 25%. L'année précédente, en N-1, son résultat fiscal s'élevait à 4 millions d'¤. L'année suivante, en N+1, elle réalise un bénéfice de 10 millions d'¤.

En N, constatation de la créance :

  • montant du déficit N : 4 millions d'¤ 
  • plafond légal du report en arrière : 1 million d'¤
  • report en arrière : 1 million d'¤
  • montant de la créance fiscale (déficit reporté x taux d'IS) = 1 000 000 x 25% = 250 000¤

En N+1, imputation du déficit restant à reporter et utilisation de la créance de carry back pour régler une partie du solde d'IS :

  • bénéfice fiscal avant imputation : 10 millions d'¤
  • déficit N restant à reporter : 4 000 000¤ - 1 000 000¤ (reporté en arrière) = 3 000 000¤
  • bénéfice imposable : 10 000 000¤ - 3 000 000¤ (déficit reporté en avant) = 7 000 000¤
  • IS à payer : 7 000 000¤ x 25% = 1 750 000¤
  • IS restant dû après imputation de la créance de carry back : 1 750 000¤ - 250 000¤ = 1 500 000¤

Numéro de compte

JJ/MM/NN

Montant

Débit

Crédit

Débit

Crédit

695

 

IS dû sur le bénéfice N+1 : 7 000 000 x 25%

1750000¤

 

 

444

IS dû sur le bénéfice N+1 : 7 000 000 x 25%

 

1750000¤

Numéro de compte

JJ/MM/NN

Montant

Débit

Crédit

Débit

Crédit

444

 

Utilisation de la créance de carry back

250000¤

 

 

4442

Utilisation de la créance de carry back

 

250000¤

Numéro de compte

JJ/MM/NN

Montant

Débit

Crédit

Débit

Crédit

695

 

Paiement du solde d'IS

1500000¤

 

 

4441

Paiement du solde d'IS

 

1500000¤

Comment comptabiliser le carry-back ?

Le montant de la créance d'impôt sur les sociétés constatée à l'occasion d'un report de déficit en arrière est comptabilisé au crédit du compte 699 Produits - Reports en arrière des déficits et au débit du compte 4442 État - Créances de carry back.

Comment reporter un déficit en arrière ? 

Le report de déficit en arrière n'est possible que sur l'exercice précédent, à hauteur d'un million d'¤. Ce report doit être demandé au plus tard au moment du dépôt de la liasse fiscale qui fait apparaître ce déficit.


Frédéric Rocci
Fondateur de Compta Online, média communautaire 100% digital destiné aux professions du Chiffre depuis 2003.
Je suis avant tout un entrepreneur. Je cotoie et j'observe la profession comptable depuis plus de 20 ans. Rédacteur à mes heures perdues, j'affectionne plus particulièrement les sujets qui traitent des nouvelles technologies et du digital.
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